La démocratie participative continue de prendre ses marques dans les institutions françaises. Après trois éditions couronnées de succès, la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) lancent leur quatrième campagne de participation citoyenne, qui se déroule du 1er au 30 septembre 2025. Une démarche qui, après trois éditions, commence à tracer un chemin intéressant vers plus d’ouverture institutionnelle.
Des premiers résultats encourageants
Depuis le lancement de cette initiative en 2022, les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 1 897 propositions ont été recueillies par la Cour et les CRTC, dont 942 rien qu’en 2024. Cette progression constante démontre l’intérêt croissant des citoyens pour les questions de gestion publique et leur volonté de contribuer activement au contrôle de l’usage de l’argent public, même si la participation reste encore limitée à une fraction de la population.
Le bilan concret est tout aussi encourageant : 58 thèmes proposés par les citoyens ont été intégrés au programme de travail des juridictions financières, et 17 rapports ont déjà été publiés. Ces résultats tangibles prouvent que la voix citoyenne n’est pas qu’symbolique mais produit de véritables impacts sur l’action de contrôle de la Cour.
Comment participer à cette démarche démocratique ?

La participation est simple et accessible : rendez-vous sur la plateforme de participation citoyenne jusqu’au 30 septembre 2025. Tous les sujets liés au bon usage de l’argent public peuvent être suggérés : gestion des déchets, lutte contre la corruption, accès au logement, réduction des inégalités scolaires, préservation des espaces verts…
La plateforme, développée avec notre solution Decidim, offre une expérience utilisateur qui permet non seulement de proposer de nouveaux thèmes, mais aussi de soutenir et commenter les propositions déjà formulées par d’autres citoyens.
Les nouveautés de cette édition
Une écoute qui s'affine
Nouveauté de cette édition : une enquête a été menée en amont auprès des visiteurs du site et des abonnés à la newsletter pour identifier les sujets prioritaires. Les résultats révèlent que la gestion des finances de l’État (20%), la santé et la protection sociale (18%), l’environnement et la transition écologique (14%), la sécurité publique et justice (13%) et l’éducation et recherche (11%) sont parmi les sujets les plus populaires.
Cette démarche d’écoute en amont est intéressante, même si elle reste circonscrite aux personnes déjà sensibilisées à la démarche. L’enjeu sera de voir si ces priorités influencent effectivement les choix finaux de la Cour.

Une analyse des contribution collaborative simplifiée
Une autre nouveauté de cette édition 2025 se déroule en coulisse mais mérite également d’être mise en avant. Le traitement et l’analyse des contributions citoyennes par la Cour passent désormais par l’outil Grist. Plutôt que des allers-retours incessants d’un fichier Excel dont on perd le fil des différentes versions, c’est via un document collaboratif que le SRPP (Service du rapport public et des programmes) préparera le travail des diverses cours. Les contributions, automatiquement importées depuis Decidim vers l’outil Grist, sont visualisables sous différentes formes dans des tableaux de bord afin d’en faciliter l’analyse et la catégorisation. Les vues personnalisées en fonction des règles d’accès permettront aux collaborateurs de se concentrer uniquement sur les contributions qui auront été rattachées à leur chambre/service.
Un processus de sélection à suivre
Après la clôture de la campagne le 30 septembre, la Cour et les CRTC examineront chaque proposition selon différents critères : popularité, nouveauté, auditabilité, faisabilité et diversité. Cette grille d’analyse garantit une sélection équilibrée qui tient compte à la fois de l’intérêt citoyen et des contraintes opérationnelles des juridictions financières.
Les enquêtes retenues seront ensuite réalisées avant d’être rendues publiques à partir de 2026, assurant ainsi un suivi concret des contributions citoyennes. Un délai qui peut sembler long mais qui correspond aux rythmes habituels de travail de l’institution.
Pourquoi cette initiative est-elle si importante ?
Cette quatrième campagne s’inscrit dans une démarche plus large de modernisation de l’action publique. En donnant aux citoyens un rôle actif dans la définition des priorités de contrôle, la Cour des comptes accomplit plusieurs objectifs cruciaux :
Renforcer la légitimité démocratique : en consultant directement les citoyens, la Cour s’assure que ses travaux correspondent aux préoccupations réelles de la société.
Améliorer la pertinence des contrôles : les contributions retenues permettront de traiter de nouveaux sujets d’enquête encore insuffisamment explorés et de soulever des enjeux prioritaires au cœur des préoccupations des Français.
Éduquer à la citoyenneté : cette démarche sensibilise les participants aux enjeux de la gestion publique et renforce leur compréhension du fonctionnement institutionnel.
Toutefois, sans transformer radicalement le fonctionnement de la Cour, cette initiative introduit une dose de participation citoyenne qui était impensable il y a encore quelques années. Il reste encore des améliorations à apporter avec une participation encore limitée sociologiquement, des critères de sélection qui mériteraient plus de transparence, et un délai entre proposition et publication qui peut décourager l’engagement.
Une plateforme numérique au service de la démocratie
L’initiative de la Cour des comptes s’inscrit dans un mouvement plus large de modernisation démocratique. Elle montre qu’il est possible d’expérimenter de nouvelles formes de dialogue, même dans des institutions traditionnellement fermées. L’utilisation de Decidim pour cette campagne illustre tout le potentiel des outils numériques participatifs. La plateforme permet une participation inclusive, transparente et structurée, facilitant le dialogue entre institutions et citoyens.
Cette expérience démontre que les outils de civic tech, lorsqu’ils sont bien conçus et déployés, peuvent véritablement transformer la relation entre gouvernants et gouvernés.
L'invitation est lancée
Malgré ses limites, cette campagne mérite l’attention. Elle offre une opportunité concrète d’influencer l’agenda de contrôle d’une institution majeure. Pour les citoyens qui s’interrogent sur l’usage de l’argent public, c’est l’occasion de pointer des sujets qui les préoccupent. Alors que les défis auxquels fait face notre société sont de plus en plus complexes, l’intelligence collective devient un atout indispensable.
Rendez-vous donc sur participationcitoyenne.ccomptes.fr avant le 30 septembre pour faire entendre votre voix.