Utilisé aujourd’hui par 150 institutions, à l’international (9 pays différents ) le logiciel Decidim ne cesse de se développer en multipliant les cas d’usage. Initialement développé pour co-construire le plan d’action municipale de la Ville de Barcelone, le logiciel est aujourd’hui au service d’organisations diverses : institutions, entreprises, associations, groupes de personnes, partis politiques etc.
Dans son article publié le 11 septembre 2019, Mission Société Numérique (Ministère de l’économie et des finances et Ministère de le cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales) décrit le logiciel Decidim comme remarquables d’un point de vue éthique. Missioné par l’Etat, Le Labo Société Numérique accompagne les territoires dans une transition numérique, répertorie les tendances numériques émergentes et apporte un regard critique sur les défis éthiques, sociaux et juridiques.
Plusieurs points on été relevés, appuyant la solidité de l’outil d’un point de vu éthique :
La nature du logiciel : un bien commun numérique « Decidim s’affirme aujourd’hui comme un véritable commun numérique. Preuve en est, un nombre croissant d’acteurs publics utilisent Decidim à l’international (en France, en Finlande, en Belgique, au Mexique, etc.) et l’adaptent à leurs usages, également séduits par la grande modularité de la plateforme numérique et la palette de fonctionnalités participatives proposées. » ;
La gouvernance ouverte du logiciel, partagé par une vaste communauté (Metadecidim) ;
La complémentarité entre physique et numérique lors des processus participatifs ;
Les fonctionnalités participatives multiples, constamment réfléchies et développées :
L’infrastructure numérique modulaire en réponse aux besoins exprimés ;
Un logiciel au service de l’interêt général : point central depuis la création du logiciel, subsistant au coeur de chaque démarche de participation.
« un outil inclusif, conçu de façon à accueillir tous les types de publics, modulaire et ajustable pour faciliter sa mise en œuvre par les différents échelons locaux, standardisés pour faciliter la communication et la réutilisation des informations, transparent pour donner confiance tout au long des processus participatifs, et suffisamment souple pour combiner les dispositifs de participation numérique et physique« .
Des plateformes qui se multiplient, une communauté qui grandit
Metadecim, cette plateforme réunissant les différents contributeurs de Decidim a été conçue pour organiser la décision collective autour du logiciel. À mesure que les plateformes se multiplient à l’international, cette communauté grandie.
« Metadecidim demeure le lieu de référence pour comprendre l’historique du projet et participer à en écrire les prochaines lignes »
Un plateforme de plus en plus attractive de par sa nature
De plus en plus d’organisations se tournent vers des solutions technologique ayant un projet éthique. Il n’est alors pas étonnant que Decidim comme « commun numérique pour une ressource éthique au service de l’intérêt général » séduise de plus en plus d’institutions publiques et organisations de tous types.
En 2011, des centaines de milliers d’Espagnol.es, manifestent dans les rues pour protester contre l’inaction politique face à la crise économique qui secoue le pays. Les syndicats et les partis politiques restent paralysés face à ce mouvement d’une ampleur inédite. Pendant des semaines, les Indignés campent et organisent seul.es une contestation de masse.
Dans ce moment d’effervescence, une réflexion inédite naît, renouvelant les rapports entre politique et technologie. L’organisation des multiples actions des Indignés via des outils numériques nourrit cette réflexion en fondant un argument désormais presque classique : les technologies numériques autorisent les citoyen.nes à s’organiser eux-mêmes, à prendre leurs propres décisions et à fixer seul.es leurs objectifs.
En dehors des instances classiques de représentation et d’expression des intérêts des citoyen.nes, les différents outils développés par les activistes du 15M leur ont permis de coordonner d’innombrables manifestations et actions coup-de-poing. Ils ont créé des structures de fonctionnement horizontales ; ils ont réussi à penser l’engagement des citoyen.nes par la co-construction deréseaux numériques.
Ce point était cardinal dans le développement de ces technologies ; il fallait inclure tous et toutes les citoyen.nes dès la conception d’un outil. Donner le maximum de garanties de transparence, d’égalité et de redevabilité était donc dans toutes les têtes. L’intégration de ces principes démocratiques au commencement de l’élaboration technique a directement favorisé l’utilisation critique et stratégique des outils numériques au service d’une action politique collective ; ce que les activistes appellent encore aujourd’hui latechnopolitique.
Decidim, fer de lance de la technopolitique
C’est cet esprit qui préside, en 2016, à la création du projet Decidim. Les instigateur.trices de ce projet, pour beaucoup des chercheur.es et ancien.nes activistes du 15M, avaient la volonté de relier les citoyen.nes via un outil dédié à la prise de décision collaborative. L’enjeu n’était pas de reproduire le 15M à l’intérieur des institutions plus que d’introduire les citoyen.nes à ces débats ; en somme, il fallait créer un outil pédagogique facilitant l’engagement des citoyen.nes et leur donnant envie d’aller plus loin dans la quête de leur propre autonomie politique.
Dans ce contexte intellectuel militant, Decidim s’est présenté comme l’outil numérique qui traduit en pratique la technopolitique en visant la responsabilisation progressive des citoyen.nes, à travers un Contrat social strict et des principes profondément démocratiques inscrits dans le code même de la plateforme.
Pour Open Source Politics, l’enjeu est de taille ; il s’agit de conserver et diffuser l’état d’esprit profondément pédagogique qui fonde la création du logiciel tout en permettant son appropriation par des acteurs qui peuvent avoir des objectifs différents des activistes du 15M. Nous travaillons donc au quotidien pour que les plateformes numériques que nous lançons introduisent les gens à la technopolitique en offrant des espaces favorisant l’expression et la discussion, médiées par un cadre et des objectifs concertationnels ou laissées libres.
Diffuser une nouvelle culture du numérique
C’est précisément ce que nous avons voulu illustrer lors du Decidim Day le 12 septembre dernier. Cette journée d’ateliers, de plénières et de tables rondes organisée par notre équipe fut une belle occasion d’expliquer le terme de technopolitique à des oreilles françaises peu habituées, ainsi que d’illustrer notre propre conception de cette idée.
Nous avons donc cherché à faire infuser les différentes réflexions soulevées par la technopolitique dans notre propre événement. La plénière d’inauguration devait permettre d’aborder deux approches différentes du rapport entre technologie et politique ; l’une à visée régulatrice développée à l’intérieur de l’Assemblée Nationale par Paula Forteza, l’autre construite patiemment et de manière décentralisée par Santiago Siri et l’équipe de Democracy Earth.
Trois parcours ont ensuite orienté les échanges dans différentes directions. Nous avons eu l’occasion de questionner la place de l’Etat et des collectivités dans la construction et le soutien aux communs numériques mais également la pertinence de la diffusion de la technopolitique dans le secteur de l’entreprise et de l’émergence de nouveaux modes de gouvernance industrielle. Une table ronde dédiée s’est également demandée s’il était possible d’identifier les différents rôles que les citoyen.nes occupent et incarnent pendant les processus de participation. Fondamentalement technopolitique, cette discussion a pu entrer dans le vif du sujet. Quelle pédagogie, quel accompagnement pour amener les citoyen.nes à s’emparer des questions politiques via la technologie ?
Tout cela nous a encouragé à discuter également de l’émergence d’un réseau français des communs généraliste, afin d’ouvrir la réflexion technopolitique à d’autres acteurs issus d’autres milieux. L’élargissement de la discussion à des exemples d’outils numériques internationaux a aussi largement contribué à l’exhaustivité des points de vue sur le sujet. Enfin, la pédagogie devant se penser comme inclusive et destinée au plus large public possible, Open Source Politics souhaitait proposer des ateliers sur le thème de l’accessibilité, de l’inclusion numérique, de la synthèse et de l’auto-gouvernance.
Enjeux technopolitiques
Chantiers Decidim et OSP
Traitement de jeux de données massifs et synthèse des consultations
Depuis 2017 nous investigons sur l'application du traitement automatique de la langue aux corpus de texte et de données issus des consultations. Relire nos articles à ce sujet sur Medium partie I et II.
- OSP développe un connecteur France Connect pour Decidim qui sera disponible cet automne 2019.
- Decidim permet mettre en place des systèmes de vérification d'identité contextuelle à l'action réalisée par l'utilisateur (vote sur une budget participatif) personnalisé.
Représentativité
Decidim est l'une des seules plateforme à proposer un module de tirage au sort.
Décentralisation et sécurité de la donnée
Decidim propose déjà un certain nombre de garanties pour la donnée que la plateforme génère (API, empreinte cryptographique des propositions etc.).
Dans le cadre du projet Européen Decode, Decidim a pu experimenter avec la technologie blockchain pour effectuer des signatures électroniques.
Le positionnement critique de la technopolitique nous permet de penser et construire nos stratégies de participation et le développement de Decidim en fonction des enjeux actuels (inclusion, prise de décision décentralisée…). Il nous encourage également au quotidien à réfléchir à des questions de pointe sur le sujet de la participation citoyenne et à nous remettre continuellement en cause sur la finalité de Decidim tel qu’il est conçu et développé par OSP. Le Decidim Day fut une réussite, en partie car il a été l’occasion de démontrer notre méthode et d’inviter nos partenaires (présents et futurs) à prendre toute leur part dans cette méthode, en constante évolution.
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