Retour sur la rencontre des membres du Digital Democracy Accelerator

Retour sur la rencontre des membres du Digital Democracy Accelerator

En photo, 5 des 6 mentors de la première promotion du Digital Democracy Accelerator : Tomas Rakos, Domenico Di Siena, Annie Cook, Valentin Chaput et Jon Stever (photo : ©People Powered).

Un programme signé People Powered

People Powered est un réseau global qui connecte depuis plusieurs années les personnes et organisations qui construisent des projets participatifs d’avant-garde à travers le monde. Parmi de nombreux programmes de partage et formation, People Powered a lancé cette année un double programme d’accélération de démarches de démocratie climatique et de démocratie digitale, intégré dans un nouvel outil d’élaboration et de suivi de démarches appelé Participation Playbook. Valentin Chaput, co-fondateur et directeur général d’OSP, a été choisi pour être l’un des 6 mentors du programme.

L’implication d’Open Source Politics

Open Source Politics est heureux du partenariat fécond engagé avec People Powered depuis trois ans. Nous avons mis en place une plateforme participative Decidim pour les discussions stratégiques de la communauté, nous participons à des projets européens et internationaux ensemble et à travers ce nouveau programme, nous allons contribuer au succès de nouvelles démarches : la conception d’un débat sur l’IA avec la communauté éducative de l’Université de Malaga et l’association CoGlobal, ainsi que l’émergence d’une culture participative dans les start-ups danoises et leurs relations avec les institutions en accompagnant l’association de dirigeants Danish Tech Startup.

Une rencontre berlinoise placée sous le signe du collectif

Les 7 et 8 novembre derniers, les membre de la promotion 2023 du Digital Democracy Accelerator se sont retrouvés à Berlin, pour deux jours de réflexions collective centrés sur les projets lauréats et leurs plans d’action initiaux. Au programme : lutte contre la désinformation, implication des jeunes dans l’élaboration des réglementations contre le harcèlement en ligne, développement d’une culture du logiciel libre dans les administrations publiques, organisation des premiers panels citoyens dans de nouveaux pays européens ou encore mise en place d’un dialogue mondial sur l’intelligence artificielle…

Lors de cet événement, nous avons eu le plaisir de retrouver nos partenaires de l’association Decidim, de Platoniq et de Missions Publiques, ainsi que les mentors qui nous inspirent depuis des années et les soutiens financiers sans qui un tel projet ne pourrait exister (Open Society Foundation et Bertelsmann Stiftung notamment).

Les leçons apprises

Avec les autres mentors du programme (Annie Cook de Decision Matters, Domenico Di Siena de DemSoc, Reema Patel d’Ipsos, Tomas Rakos de Participation Factory et Jon Stever d’Innovation For Policy), nous avons partagé de nombreuses leçons apprises sur les 5 continents au cours de la décennie écoulée.

Il faut repenser nos vies numériques

Alors que nos vies numériques ont été complètement privatisées et enfermées dans des bulles de confort qui influencent nos comportements au-delà de ce dont nous avons conscience, il faut concevoir de nouvelles politiques numériques et de nouveaux outils publics, centrés sur les besoins collectifs et la justice sociale.

Les outils numériques ne sont pas magiques

Leurs succès dépend de l’usage que l’on en fait et de notre capacité à atteindre des publics cibles diversifiés et éloignés des décisions et/ou des usages numériques. Pour cela, il est important de trouver le bon degré de simplicité d’usage et de complexité des politiques publiques à transformer, le bon alliage entre participation en ligne et hors ligne, et les modalités qui égalisent les participants entre eux.

Un équilibre entre consensus et controverse doit être trouvé

Il faut également trouver le bon équilibre entre des démarches délibératives (comme les assemblées citoyennes) qui tendent vers le consensus, et le besoin d’exprimer et explorer les controverses et la polarisation présentes dans la société. Les démarches doivent être plus créatives, fondées sur une réelle intelligence collective qui n’émerge que si nous alternons les phases de dialogue ouvert et de convergence.

La mise en perspective est primordiale

Il est important de mettre en perspective nos propres conceptions de ce que doit être une bonne démocratie, au regard de démarches très ambitieuses conduites dans des pays que l’on pourrait qualifier d’autoritaires, alors que certaines démarches ne sont que des artifices dans les pays occidentaux. La session de Jon Stever sur le co-design des innovations démocratiques au Rwanda et au Sénégal a ainsi été très appréciée. Au-delà des temps de travail, de passionnantes discussions ont confronté nos regards sur l’état – souvent préoccupant – des démocraties en Europe, aux États-Unis, en Amérique latine et en Afrique.

Rien n’est figé dans le marbre

Il est possible de répliquer des modèles, de reproduire des recettes, mais il est toujours nécessaire de les adapter pour des démarches sur-mesure, qui restent par nature expérimentales et peuvent donc échouer en raison de multiples facteurs externes difficilement prévisibles. Nous avons notamment évoqué l’impact des alternances politiques, qui peut remettre en cause de fragiles acquis en matière de culture de la délibération.

La participation citoyenne est efficace et audacieuse

La participation citoyenne apparaît particulièrement efficace sur les sujets très controversés pour lesquels la population se trouve généralement en avance sur une classe politique frileuse (mariage homosexuel, fin de vie) ou émergents et non régulés (l’IA est dans toutes les têtes en ce moment).

L’innovation ne fait pas tout

Enfin, et c’était peut-être le conseil le plus contre-intuitif et marquant pour nous, nous avons retenu la recommandation de Tomas et Domenico : il n’est pas nécessaire de mettre en avant le caractère innovant et démocratique des exercices participatifs que nous menons pour convaincre et embarquer des parties-prenantes qui veulent surtout prendre des décisions plus efficaces, obtenir des données plus précises, améliorer la gestion de leurs projets, produits ou services publics. Comme des héritiers modernes des personnages de Molière, ils finiront par s’apercevoir des plus-values de la participation dont ils vont faire l’expérience sans en avoir conscience.

Rendez-vous au printemps pour évaluer les avancées des projets de démocratie numérique et justice sociale que nous avons hâte de voir se concrétiser.

La participation citoyenne au prisme de Rousseau – épisode 3 : la représentation citoyenne

La participation citoyenne au prisme de Rousseau – épisode 3 : la représentation citoyenne

Pour ce dernier épisode de notre série de l’automne à propos de la crise de la représentation, il s’agit ici de présenter succinctement l’œuvre générale de Rousseau, de l’analyser et la faire discuter avec les considérations sur la représentation qu’elles impliquent. Cette mise en discussion permet une compréhension plus fine des critiques du modèle représentatif en questionnant si les problématiques enjointent par la représentation sont de fait inhérentes au modèle en lui-même ou si la piste d’une crise de la représentation reste à considérer.


Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes

Ce texte est fondamental dans l’œuvre de Rousseau. Il y expose notamment sa conception de l’état de nature. La démarche de Rousseau se veut assez proche de celle des scientifiques, se bornant à émettre des hypothèses sur la formation du monde. Il en émet un constat selon lequel l’inégalité consacrée par la société a perverti l’homme naturel, et a remis en cause ce qui faisait son essence même, c’est-à-dire la liberté et l’égalité. Cette conclusion est particulièrement importante dans la mesure où elle constitue la base de toute la doctrine politique rousseauiste, laquelle peut d’ailleurs se résumer en une seule question : comment rétablir dans la société la liberté et l’égalité connue lors de l’état de nature ? 

Rousseau va montrer que les inégalités sociales ne sont pas fondées en nature et qu’elles résultent de la transformation que la société opère en l’homme. Il engage une démarche d’analyse régressive montrant tout ce qui n’est pas naturel en l’homme et permet ainsi de récuser l’erreur des jusnaturalistes, attribuer à la nature ce qui est le produit de sa dénaturation. Cette démarche se fait de manière épistémique ; comprendre ce que sont les hommes requiert d’expliquer comment ils sont devenus tels, et de séparer ce qui procède « des changements successifs de la condition humaine » de ce qui tient de son « état primitif ». S’il doit être question de « l’homme de la nature » c’est pour caractériser « l’homme civil » et non l’inverse. Le second discours est un discours sur l’origine de l’inégalité, le conflit et la servitude, trois traits qui sont pour Rousseau, constitutif de l’État civil. Il n’y a pas chez Rousseau de volonté de retour à l’état de nature tel qu’il pouvait exister au début de notre ère, mais bien celle de restaurer la liberté et l’égalité dans la société. C’est à ce défi que va travailler Rousseau dans ses œuvres postérieures, et c’est dans ce contexte idéologique qu’une analyse de Du Contrat Social est possible.

Contrat social

Dans Du contrat social, Rousseau entreprend une théorisation d’une communauté politique répondant aux problèmes inhérents aux sociétés marchandes qu’il a identifiées dans le Second Discours. Il y développe sa pensée d’une manière assimilable aux mathématiques en décrivant les énoncés de sa thèse initiale selon laquelle l’homme doit se tenir proche des lois de la nature en soustrayant ce que la société a apporté à l’homme. Du contrat social établit le fait qu’une organisation sociale dite juste repose sur un pacte social garantissant l’égalité et la liberté des citoyens. Ce pacte social induit le renoncement à la liberté naturelle à la faveur d’une liberté civile pour une souveraineté populaire inaliénable, indivisible et infaillible ainsi que pour une recherche de l’intérêt général par la volonté générale. Le principe de l’institution politique est le contrat social or c’est la volonté du peuple qui maintient ce contrat qu’il peut rompre quand il n’en veut plus. A partir de ce pacte social, Rousseau induit la légitimité politique, le gouvernement ou la législation. 

Le gouvernement, un mal nécessaire ?

Chez Rousseau l’existence d’un souverain avant celle du gouvernement signifie que ce dernier n’est qu’un phénomène secondaire d’un point de vue juridique, l’action qui institue le gouvernement n’est pas un pacte mais une loi, et les dépositaires de la puissance exécutive ne sont point des maîtres du peuple mais des officiers que le peuple peut justement destituer. Le contrat social établit ainsi que la société précède au gouvernement et se maintient en faisant fi des changements. Le gouvernement est un mal nécessaire parce que les hommes ont besoin d’être guidés dans l’exercice de leur liberté. Et l’ordre qu’il établit est capital pour le contrat. Les inégalités de rang qu’il crée entre les citoyens sont artificielles car tous sont égaux. Il faut, toutefois, que le gouvernement soit assez puissant pour dominer les volontés particulières des citoyens sans qu’il ne le soit assez pour dominer la volonté générale ou les lois. Au cours de ce livre, Rousseau soutient le fait que la force législatrice appartient au peuple. C’est le peuple qui décide de l’orientation des lois, il fait la distinction entre les décisions qui ont force de lois et les simples actes des autorités gouvernementales. 

Les trois formes de gouvernement

En effet, le gouvernement ne propose pas de lois, il les met en œuvre, il traduit la volonté générale du peuple par des actions qui la rendent effective. Selon Rousseau, il existe trois formes de gouvernement qui se définissent par leur nombre de membres ; la démocratie implique un peuple qui s’assemble pour vaquer aux affaires publiques, ce qui induit un Etat qui soit petit. Rousseau récuse la monarchie qui favorise la volonté du Prince à celle du peuple. Enfin, l’aristocratie élective – non héréditaire qui doit être bannie – choisie par le peuple. Parmi ces trois formes de gouvernement aucune ne semble être universellement idéale mais chacune peut l’être en fonction du peuple et du territoire dont il est question. C’est ce qu’il apparaît dans les écrits de Rousseau sur la Corse et la Pologne.

« Droit politique »

En effet, ces écrits semblent suivre le sillage du Contrat Social tant ils sont dans la continuité de l’idée selon laquelle de nouvelles institutions peuvent rétablir l’égalité et la liberté naturelle dans la société. Rousseau semble y poser les bases de ce qu’il désigne sous le nom de « Droit politique » et dont l’objet porte sur la légitimité de l’autorité politique. Dans ce qu’il apparaît comme un passage d’une approche normative à positive, la démarche philosophique de Rousseau devient juridique, ses deux projets de constitution peuvent être associés tant ils sont porteurs de projets de réforme constitutionnelle. La différence des réalités politiques impose des solutions spécifiques à chaque État sans que ni le but, ni l’objet de ces projets ne changent. Leurs différences quantitatives et qualitatives des territoires encouragent Rousseau à préconiser deux formes distinctes pour l’État en conseillant une démocratie pour la Corse et la persistance d’une république monarchique en Pologne. 

Cette mise en pratique souligne la conjonction de la pensée propre de Rousseau et sa malléabilité au vue des spécificités de l’État mettant ainsi en lumière une possible complémentarité des lois et des mœurs. De plus, la conjugaison de ces deux projets de constitution soulève la question de l’identité nationale en tant que fondement de l’ordre constitutionnel proposé. Par des considérations étatiques différentes, Rousseau montre la mise en pratique de ce qu’il exprime dans le contrat social, en l’occurrence le fait qu’il n’y a qu’un bon gouvernement possible dans un État. En effet ses préconisations sont le ressort d’une étude approfondie des particularités de la Pologne et la Corse. Par ces considérations, Rousseau exerce une étude de pragmatisme politique de chaque réalité, il ne conçoit pas un modèle universel applicable à tous les États. En ce sens qu’un code de loi, pour Rousseau, ne cherche pas dans l’absolu un système parfait mais à étudier la législation qui convient le mieux à un État. Se pose alors la question de savoir dans quelles conditions un code de loi peut-il convenir à un peuple ?

Les trois principes piliers de la pensée rousseauiste

L’intérêt

Ainsi, la pensée rousseauiste s’établit sur trois principes piliers qui sont l’intérêt, la volonté générale et le bien commun. C’est à partir d’une compréhension de ces trois préceptes qu’une lecture, analyse de ses écrits peut être rendue possible.  A propos de la volonté du souverain, Rousseau défend le fait que le souverain ne peut pas se référer à l’ensemble des intérêts des citoyens mais exclusivement à l’intérêt partagé par tous. S’il n’y avait pas un point sur lequel tous les intérêts convergent, aucune société ne pourrait exister1. Selon lui, la domination de l’État est légitime lorsqu’elle se limite à la réalisation de l’intérêt commun de tous les citoyens. L’étendue de la conjugaison de tous les intérêts des citoyens définit les limites de compétence de la domination étatique. Ainsi,  plus elle est petite, moins le besoin de lois est nécessaire et donc, plus la liberté des citoyens est grande. En suivant Rousseau, il est possible de parler de loi que si la chose sur laquelle on décide est aussi générale que la volonté qui décide2. Si la législation doit protéger non pas les intérêts communs à tous les citoyens, mais différents intérêts privés, l’État n’est plus fonctionnel.

La volonté générale

Dans cette continuité, il apparaît dans l’œuvre de Rousseau que l’État et la loi ont pour mission de protéger la personne et les biens de chaque citoyen. L’intérêt partagé par tous les citoyens en raison de leur nature égoïste est celui de l’égalité en droit. Alors, les obligations envers le corps social ne sont contraignantes que parce qu’elles sont réciproques. Si chacun veut toujours le bonheur de chacun, c’est parce qu’il pense à lui-même quand il vote pour tous3.

Le bien commun

Enfin, à propos de bien commun, pour Rousseau, celui-ci ne doit rien comporter d’autre que l’intérêt personnel rationnel de chaque citoyen, pour autant qu’il soit compatible avec le principe de réciprocité. La morale commande ainsi d’éviter les situations qui mettent les devoirs en contradiction avec les intérêts. Le bien-être de chaque citoyen est une affaire politique et ne doit pas être sacrifié au bien-être de la multitude. Ce bien-être se conditionne en partie lors de l’établissement du contrat social qui instaure l’égalité des droits et exige une aliénation totale des citoyens. Lors de la réalisation de ce contrat social, tous les citoyens veulent que les conditions soient les mêmes pour tous4. De manière à respecter cela, L’égalité juridique doit neutraliser les inégalités sociales, mais ne peut pas les corriger. La tâche de la législation se limite à la liberté et à l’égalité. Par liberté, s’entend l’indépendance de chaque citoyen. 

L’égalité, condition de la liberté

En effet, toute dépendance privée qui se crée entre les citoyens est susceptible d’affaiblir le corps de l’État. Les citoyens sont égaux lorsque personne ne dépend d’un autre, et cette égalité est la condition de la liberté. L’égalité ne signifie pas que tous les citoyens disposent du même pouvoir et de la même richesse. Mais Rousseau prévient que si l’inégalité en termes de pouvoir et de richesse dépasse un certain niveau, elle peut alors avoir un effet corrupteur : le citoyen riche peut acheter le citoyen pauvre et ce dernier est obligé de se vendre. Comme le cours des choses menace de détruire l’égalité, la force de la législation doit œuvrer au maintien de l’égalité5. Ainsi, l’égalité que la loi doit protéger présuppose la parfaite indépendance de chaque citoyen6.

Critique de la représentation

La critique rousseauiste de la représentation semble principalement porter sur le principe d’aliénation qui a lieu lorsque les citoyen·nes renoncent à leur liberté et à leur pouvoir de se donner la loi. En ce sens, le ou la citoyen.ne qui cède son vote dans condition pour confier cette tâche à d’autres, devient esclave. Ainsi, La souveraineté, en tant qu’exercice de la volonté générale, est inaliénable, elle ne peut pas être représentée parce que la volonté ne peut pas être représentée ; le souverain ne peut se représenter que lui-même7. Les assemblées de députés ne peuvent pas se substituer au souverain8

Si la représentation n’est pas comprise comme une aliénation, mais comme une délégation, un mandat assorti de conditions, elle peut toutefois avoir un sens. Lorsque le peuple désigne des députés, ceux-ci ne sont pas ses représentants, mais des mandataires temporaires, des commissaires qui ne peuvent rien décider de manière définitive9. Le peuple doit se réserver le droit de décision définitive et l’exercer. Certes, dans les grands États, le pouvoir législatif doit être représenté par des députés, mais les députés sont corruptibles. Le risque de corruption peut être évité par le biais d’un mandat impératif, d’un mandat court et de l’obligation de rendre des comptes pour les députés. La « stupidité de la nation anglaise » réside dans le fait que les députés se voient confier le pouvoir suprême pour sept ans sans être soumis à aucun contrôle10.

Il semble ici nécessaire d’expliciter ce que Rousseau entend sur la délégation d’un certain pouvoir à des députés qui peut entrer en contradiction avec le fait que « la souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être aliénée» 11 et le cas des Anglais mentionné ci-dessus et exprimé en ces mots : « Le peuple anglais pense être libre ; il se trompe fort, il ne l’est que durant l’élection des membres du Parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien. Dans les courts moments de sa liberté, l’usage qu’il en fait mérite bien qu’il la perde »12.

Il est possible de lire ici l’expression de la pensée de Rousseau envers la représentation en trois temps. Tout d’abord, son développement semble prendre appui sur le fait que la souveraineté, qui consiste dans la volonté générale, ne peut se représenter. Ce qui est la raison pour laquelle les élus ne sont pas et ne peuvent pas être des représentants du peuple mais seulement des commissaires. Et enfin c’est ce qui justifie ses considérations sur les Anglais qui, selon lui, croient être libres alors que dès que les représentants sont élus, ils sont esclaves. De plus, pour Rousseau, toute représentation tend à simplifier et à réduire les différences de pensée de sorte que la décision d’une entité représentative est nécessairement moins diversifiée et générale que celle d’une assemblée dans laquelle l’ensemble des concernés sont pris en compte. 
De par ce développement, Rousseau ne semble pas tout à fait défendre un modèle de démocratie directe au sein duquel le citoyen participerait à part entière à l’ensemble du processus décisionnel politique. En étant dans le refus total de la notion de représentation du peuple et de sa volonté générale à travers les députés, il n’apparaît pas se positionner à un corps d’État qui serait au service du peuple et ainsi de la volonté générale. Par la suite, Rousseau va d’ailleurs insister sur le fait que ce qui institue le gouvernement ce n’est pas un contrat mais une Loi, ce qui implique et renforce le fait que le rôle du député se limite à celui de commissaire et non à celui d’un représentant. Le commissaire devant rendre compte et obéir au peuple souverain.”Toutefois, il se pose alors la question de savoir de quelle manière est-ce qu’il est possible que les députés ne dépossèdent pas totalement le peuple de sa souveraineté ?


  1.  Jean-Jacques Rousseau (1755), « Du contrat social », Paris, Le livre de poche, 2011 livre  II, 1 
  2.  Ibid livre  II, 6
  3.  Ibid livre I, 6 II, 4
  4.  Ibid livre  I, 6
  5.  Ibid livre  II, 11
  6.  Ibid livre  II, 12
  7.  Ibid livre  II, 1 ; III, 15
  8.  Ibid livre  II, 3
  9.  Ibid livre  III, 15
  10.  Ibid livre  III, 15
  11.  Ibid livre  III, 15
  12.  Ibid livre  III, 15
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