Numériser le droit d’interpellation c’est possible : l’exemple du CESE

Numériser le droit d’interpellation c’est possible : l’exemple du CESE

Le droit de pétition – ou droit d’interpellation – a fait un retour en force depuis un peu plus de 20 ans avec des plateformes numériques dédiées, comme Avaaz ou Change.org. Depuis la fin des années 1990, le recueil de pétitions est devenu le premier usage participatif en ligne en volume, mais aujourd’hui, Decidim permet d’aller plus loin. Ce logiciel open source permet de mettre en pratique le droit d’interpellation à toutes les échelles grâce à un module intégré dont la robustesse a été éprouvée par de grandes institutions comme le Sénat et l’Assemblée nationale et, depuis peu, par le Conseil économique, social et environnemental (CESE).

Droit d’interpellation, de quoi parle-t-on ? 

Le droit d’interpellation est un mécanisme politique et/ou institutionnel qui désigne la possibilité de faire valoir une demande ou une revendication à une autorité ou une institution, la plupart du temps à travers un texte, comme la pétition, mais également à travers d’autres types de communications. Ce droit ne suppose pas le devoir de l’autorité ou de l’institution d’y répondre, mais y incite fortement dans une démocratie moderne. En outre, son intérêt réside dans le fait qu’il constitue un cadre permettant une sollicitation des représentés vers les représentants, alors que les démarches participatives classiques sont mises en œuvre par les représentants pour les représentés. Il peut s’exercer à deux niveaux. 

Le premier niveau est institutionnel

Au Parlement, où les parlementaires peuvent interpeller le Gouvernement. Dans ce cadre, l’interpellation est souvent suivie d’un débat et d’un vote. 

Le second niveau est civique

Les citoyens et citoyennes peuvent interpeller les responsables des institutions politiques. Ce dernier cadre, dans un régime démocratique, induit que les responsables s’engagent à répondre à l’interpellation que leur ont adressée les populations, qu’elles soient locales, nationales ou internationales, sous certaines conditions, comme par exemple le nombre de signatures, le plus souvent recueillies dans un délai imparti. A ce titre, ce droit apparaît comme un mécanisme appartenant à la « boîte à outils » de la démocratie directe.

Le droit d’interpellation en France, un droit qui vient de loin 

Bien que la période de la Révolution française foisonne de pétitions, l’interpellation apparaît sous la Monarchie de Juillet (1830 – 1848). Le personnage principal de ce progrès politique est le député François Mauguin, aux orientations libérales et considéré comme le « père de l’interpellation », s’inspirant lui-même d’une tradition britannique très ancienne. Codifié par le règlement de l’Assemblée nationale en 1848, aboli puis rétabli par Napoléon III, le droit d’interpellation a connu des fortunes diverses selon les régimes au XIXe siècle. Sous la IIIe République, le droit d’interpellation s’ancre dans le droit français, laissant la possibilité aux parlementaires d’interpeller le gouvernement ou un membre du gouvernement. On le voit, c’est donc uniquement dans le cadre parlementaire que le droit d’interpellation est codifié et mis en œuvre. Le régime actuel de la Ve République, à la coloration présidentialiste, prévoit néanmoins des possibilités pour les parlementaires comme les Questions au Gouvernement ou le dépôt de propositions de loi sur des temps dédiés du calendrier parlementaire. 

RIC ET RIP, déclinaisons du droit d’interpellation ? 

En 2018, le mouvement des Gilets Jaunes, à travers la revendication du RIC – référendum d’initiative citoyenne porté par Priscilla Ludosky – peut être considéré comme une déclinaison du droit d’interpellation. A l’occasion des élections municipales de 2020, plusieurs majorités locales ont mis en œuvre ce type de dispositifs dans toute la France, en appelant en renfort les outils numériques.

Le RIP – Référendum d’Initiative Partagée – quant à lui, est un mécanisme encadré par la loi et qui relève également du droit d’interpellation. Il a été activé en 2019, dans le cadre du projet de privatisation de l’entreprise Aéroport de Paris, sans pour autant donner lieu à un référendum. Le Conseil Constitutionnel a émis de nombreuses critiques à propos du RIP, dont les contraintes (ergonomie du site web, seuil de signatures,…) lui semblent trop importantes pour aboutir.  

Grâce à ces nouveaux outils justement, nombreux sont  les citoyennes et citoyens qui souhaitent exercer ou pouvoir exercer leur droit d’interpellation. Les institutions parlementaires se sont saisies des possibilités. L’Assemblée nationale et le Sénat sont aujourd’hui tous les deux équipés de plateformes de pétitions à destination des citoyens souhaitant interpeller les parlementaires sur tous les sujets. Le CESE fait de même et nous l’accompagnons dans la mise en ligne d’une plateforme d’interpellation citoyenne qui verra le jour en avril 2023.

Pour aller plus loin : Open Source Politics déploie une plateforme pétitions pour le Sénat

Exemple contemporain du droit d’interpellation – le cas du Conseil économique, social et environnemental

Après avoir évoqué le projet à plusieurs reprises au cours des dernières années, le Conseil économique, social et environnemental se dote d’une plateforme numérique simplifiée de pétitions citoyennes. Car de 2008 à 2021, le CESE pouvait déjà être saisi par voie de pétition citoyenne pour toute question à caractère économique, social ou environnemental, mais les chances de voir sa pétition recueillir le nombre de signatures suffisantes étaient minces. Le seuil à atteindre était de 500 000 signatures… sous format papier !

Pensé pour être un « acteur de premier plan de la vie démocratique française », le Conseil économique, social et environnemental a vu son champ d’action en matière de participation citoyenne être étendu par la loi organique de 2021. Depuis cette date, le seuil des signatures est ramené à 150 000 noms, l’âge minimum pour initier ou signer une pétition est abaissé à 16 ans et le format numérique est désormais recevable.

Pour permettre la digitalisation de ce droit, le CESE a fait appel une nouvelle fois à Open Source Politics pour l’accompagner dans la mise en place d’une plateforme participative. Depuis le 12 mai 2023, la plateforme d’e-pétition du Conseil est officiellement ouverte au public. Toute l’équipe d’Open Source Politics est ravie de vous présenter l’instance www.lecese.fr/participation-citoyenne sur laquelle nous avons travaillé ces dernières semaines.

L’organisateur de la Convention Citoyenne pour le Climat est habitué aux démarches participatives. Depuis 2018, il a adopté six travaux issus d’une méthodologie de travail qui intègre à la fois l’expertise de la société civile organisée et la parole citoyenne. En outre, il a mis en place un dispositif de veille active des pétitions sur les plateformes en ligne. Si le Conseil économique, social et environnemental (CESE) observe l’émergence d’un sujet relevant de ses responsabilités fondamentales, il peut s’auto-saisir de la problématique soulevée par la ou les pétitions identifiées sur ce sujet.

« Avec l’association de citoyens à ses travaux, la constitution de conventions citoyennes, et maintenant la possibilité d’être saisi par voie de pétition, le CESE dispose de l’expertise, l’expérience et des outils pour faire résonner la parole citoyenne utilement aux côtés de celle des organisations de la société civile. »

Thierry Beaudet, Président du CESE

Et au niveau local, pourquoi est-il aussi important de favoriser la mise en place du droit d’interpellation ?

Plusieurs arguments en faveur de la mise en place du droit d’interpellation s’ancrent aujourd’hui dans le débat public, retenons en trois.  

1 Pour participer à l’équilibre institutionnel local

Il s’agit d’un dispositif participant à l’équilibre institutionnel local. En effet, les dispositifs participatifs, numériques ou non, sont proposés et déployés par les collectivités, de l’institution vers les populations. Un droit d’interpellation local permet de contrebalancer le rapport de force, des citoyens vers l’institution. 

2 Pour développer le pouvoir d’agir des populations

Le droit d’interpellation peut améliorer la visibilité accordée à des problématiques mal ou pas identifiées par les élus locaux et les agents des collectivités. Des dérives sont possibles comme le nymbisme, de l’expression anglaise « Not In My BackYard » (pas dans mon jardin), mais la possibilité pour les citoyens et citoyennes de participer à l’établissement des priorités politiques s’avère une piste intéressante pour renforcer le tissu démocratique local.

3 Pour ouvrir la participation à la vie publique locale

Enfin, la simplicité des formats autorisés par l’interpellation, en acceptant le principe d’une expression « directe », élargit potentiellement le nombre de personnes qui peuvent s’inscrire dans la vie publique locale et engager le dialogue avec les élu·e·s et les fonctionnaires.

Pour aller plus loin : « La saisine du Conseil économique, social et environnemental par voie de pétition citoyenne : gage d’une Ve République « plus démocratique » ? », DE CAZALS Marie pour la Revue française de droit constitutionnel, 2010/2 (n° 82). « L’interpellation, une forme d’expression citoyenne », La Gazette des communes.

Quand la démocratie participative rencontre la démocratie représentative : la plateforme participative de la Députée Maud Petit

Quand la démocratie participative rencontre la démocratie représentative : la plateforme participative de la Députée Maud Petit

Le débat qui oppose la démocratie participative et la démocratie représentative revient fréquemment agiter le secteur de la participation citoyenne, le monde des élus et plus largement le débat public. Cette opposition ne résiste pourtant pas à l’examen. On constate partout l’hybridation des formes participatives et représentatives. Dans ce contexte, des élus prennent des initiatives innovantes. Cas pratique avec la députée du Val de Marne, Maud Petit. 

https://consultons-noiseau.fr/

Une innovation locale d’hybridation démocratique

La démocratie participative est de plus en plus présentée non pas en tant qu’alternative qui vise à remplacer complètement la démocratie représentative traditionnelle, mais en tant qu’ensemble de pratiques complémentaires à celle-ci. 

Les dispositifs de concertation, de consultation citoyenne, et d’assemblées régulières peuvent combler le vide structurel laissé par les institutions représentatives qui se saisissent de la volonté directe des citoyens uniquement lors des élections. Cette hybridation est de plus en plus sollicitée par les citoyens, mais pour l’instant elle ne se concrétise qu’au sein d’expérimentations non réglementées. À l’échelle locale, la volonté politique des élus arrive désormais à impulser une pratique régulière de la consultation citoyenne à travers des formats de plus en plus structurés, tel que le budget participatif ou bien les conseils de quartier. 

→ Pour aller plus loin, voir notre article : Budgets participatifs en France : 5 exemples actuels pour les collectivités.

Au niveau national, les institutions se lancent de plus en plus dans des expérimentations ambitieuses : tel est le cas de la Cour des Comptes qui a ouvert son agenda de travail aux contributions citoyennes. 

→ Pour aller plus loin, voir notre article sur la plateforme citoyenne de la Cour des Comptes.

De plus, le numérique a rendu possible la montée en puissance des formats traditionnels de participation citoyenne : c’est le cas du droit de pétition, un droit civique qui date de la révolution française, aujourd’hui rendu accessible et capable de monter en échelle plus rapidement à travers les plateformes numériques et le système d’identification France Connect. 

→ Pour aller plus loin, voir la plateforme des pétitions du Sénat.

Les élus nationaux ont été peu touchés jusqu’à présent par les dynamiques de consultation citoyenne : les exemples les plus remarquables concernent les nouveaux formats de campagne électorale, comme celle de Quitterie de Villepin, candidate indépendante aux législatives 2022 dans la 2ème circonscription de Paris. Cela pourtant ne couvre que la phase antérieure aux élections. 


Etude de cas – consultation sur un projet de construction d’un centre pénitentiaire

En revanche, aujourd’hui on présente le cas d’une élue au Parlement qui a décidé de sa volonté de consulter les habitants de sa circonscription pour orienter son positionnement et ses travaux autour d’un sujet spécifique : la députée MoDem Maud Petit, élue à l’Assemblée nationale dans le Val-de-Marne (94), qui a demandé l’avis des habitants de la commune de Noiseau par rapport au projet de construction d’une prison

Le projet d’ouverture d’un établissement pénitentiaire qui vise à accueillir environ 750 détenus date de 2018, lors du lancement du « programme 15 000 » par le ministère de la justice. Ce programme a pour objectif de réduire la surpopulation des prisons à travers l’ouverture de 15 000 places additionnelles à horizon 2027. 

Le territoire de la commune de Noiseau, 4400 habitants dans la 4e circonscription du Val-de-Marne, a été identifié comme le bon endroit pour construire une prison d’environ 750 places d’après les études de faisabilité. Les riverains de cette petite commune ont pourtant réagi de manière coordonnée contre ce projet. Plusieurs manifestations ont eu lieu depuis l’annonce du projet, une pétition a récolté plus de 3000 signatures. La députée Maud Petit, même en faisant partie de la majorité, a porté la voix des citoyens pendant son premier mandat, notamment en interrogeant la Garde des Sceaux au sein de l’assemblée nationale. Le projet a été stoppé par la crise du Covid. Lors de la campagne électorale, la députée s’est engagée à reconsulter les citoyens pour orienter son action au parlement par rapport à ce sujet. Après le covid, il était important pour elle de vérifier à quel point la mobilisation citoyenne vue dans les années précédentes était toujours active. 

Prendre le pouls de la mobilisation citoyenne

La plateforme participative en ligne Consultons Noiseau a été lancée dans cet objectif : les habitants de la ville de Noiseau se sont exprimés pendant la période estivale, entre le 13 juillet et le 5 septembre, à travers un questionnaire anonyme. A l’issue de cette consultation, 450 réponses ont été récoltées, c’est-à-dire environ 10% de la population locale. Les résultats ont été analysés à la présence d’un huissier de justice afin d’en garantir la validité.

La quasi-totalité des répondants s’est exprimée contre le projet de construction de la prison. Une restitution publique a eu lieu lors de la réunion en présentiel du vendredi 9 septembre organisée par la députée Maud Petit. Le constat est assez clair : malgré une mobilisation importante et transpartisane pour le « non », la proportion des habitants qui ont agi est trop faible pour parler à l’Assemblée nationale au nom de toute la commune. Le plaidoyer ne peut donc pas être poursuivi légitimement, comme affirmé par la députée dans sa lettre aux noiséens et aux noiséennes. 

Les bonnes pratiques à retirer de l’initiative

Cette démarche de participation citoyenne, au-delà de constituer un cas d’usage expérimental et innovant, regroupe aussi un ensemble de bonnes pratiques qui devrait s’appliquer à n’importe quelle initiative de consultation citoyenne. D’abord, le format conçu était simple et aligné avec l’objectif : un questionnaire rapide et lisible, anonyme mais contraint à la création d’un compte sur la plateforme pour éviter des doublons. Sur Decidim, dans le respect du RGPD, les réponses ne sont pourtant pas associées aux adresses mails des participants, ce qui empêche d’associer une personne à sa réponse. 

Une campagne de communication très réussie a accompagné la démarche tout au long de l’été et à travers les différents canaux : brochures en papier dans les boîtes aux lettres des riverains, profils réseaux sociaux de la députée, groupes réseaux sociaux des habitants, presse locale et nationale. En plus, la supervision d’un huissier de justice à évité l’effet « boîte noire » pendant l’élaboration des résultats et a donné légitimité à une démarche non réglementée par la loi. Finalement, la réunion publique en présentiel qui a clôturé la période de consultation a permis un moment d’échange direct entre les citoyens et l’élue. « Seul bémol identifié, l’absence d’un format de réponse en papier, très utile pour permettre aux publics éloignés du numérique de s’exprimer ».

Plus important : le résultat de la consultation a été annoncé sans filtre par l’organisateur et pris en compte. Maud Petit a pris acte et reconnu que le faible taux de participation ne pouvait soutenir une prise de position au nom de toute la population. Faute de réglementation, c’est à l’organisateur de garantir une suite de consultation qui respecte ses résultats.

Faire évoluer les pratiques de politiques publique

Forte de cette première expérience, la députée Maud Petit a choisi de garder la plateforme participative et de faire rentrer la consultation citoyenne, en ligne et hors ligne, dans le cadre ordinaire de son travail au sein de l’Assemblée nationale. Cela lui permettra de garder un lien étroit avec le terrain et en particulier avec la circonscription qui a légitimé son mandat, tout en restant une représentante de l’ensemble de la population française. 

Evènement-Livre : L’énergie de l’Etat, Jean-François Bayart

Evènement-Livre : L’énergie de l’Etat, Jean-François Bayart

Comment penser l’ébranlement qu’a suscité le passage, aux XIXe et XXe siècles, d’un monde d’empires, gouvernant par la différence ethnique et religieuse, à un système d’États-nations, imposant une uniformisation culturelle et une conception exclusive de la citoyenneté ? La manière dont a émergé la construction intellectuelle qu’est l’Etat conditionne-t-elle encore les évolutions sociales actuelles ? C’est la tâche à laquelle s’attelle Jean-François Bayart, spécialiste de sociologie historique et comparée du politique, dans son nouveau livre, “L’énergie de l’Etat”.

Nous aurons l’honneur de le recevoir le lundi 9 mai à 18h30 au Liberté Living Lab, que nous remercions pour son partenariat, afin qu’il nous présente cet ouvrage et engage une discussion collective autour des thèmes qui y sont abordés. 

Nous réunissons deux discutant.es expérimenté.es pour approfondir ces questions et partager des solutions :

  • Caroline Corbal, Co-fondatrice de Code for France;
  • Rémi Carayol, journaliste à AfriqueXXI, Le Monde Diplomatique et Mediapart, spécialiste du continent africain;
  • Le débat sera animé par Olivier Buchotte, co-fondateur d’Open Source Politics, et Antoine Gaboriau, chargé de la recherche chez OSP.

Rendez-vous le 9 mai à 18h30 pour la conférence : Inscription (les personnes non inscrites seront admises dans la limite des places disponibles)

La Cour des comptes lance sa plateforme participative !

La Cour des comptes lance sa plateforme participative !

Du 9 mars au 20 mai 2022, sur la première plateforme participative de la Cour des comptes, les citoyens français peuvent faire des suggestions de contrôle à mettre à son agenda. L’objectif de la Cour des comptes reste le même : s’assurer du bon emploi de l’argent public et émettre des recommandations de bonne gestion, mais désormais avec le concours des citoyens. En septembre, les six “propositions les plus intéressantes, novatrices et plébiscitées” de contrôle seront sélectionnées et présentées au public ! 

Une plateforme participative dans le cadre du Partenariat pour un Gouvernement Ouvert 

Le dispositif numérique de participation citoyenne que constitue la plateforme de la Cour des comptes est une innovation importante. Elle prend racine dans la volonté de l’institution de faire sa part dans le cadre du Partenariat pour un gouvernement ouvert, coordonné en France par la Direction Interministérielle de la Transformation Publique

Ce partenariat est une initiative internationale qui incite les Etats et les institutions étatiques à favoriser l’ouverture des données (open data), et la participation la plus large possible de ou des citoyens à ses activités (open governement). Le lancement de la plateforme citoyenne de la Cour des comptes est un exemple remarquable en matière de gouvernement ouvert.  

Une mise à l’agenda ouverte et collaborative sur Decidim 

La Cour des comptes se dote d’une plateforme participative Decidim pour permettre aux citoyens d’exercer ce qu’on appelle le droit de requête. Ils peuvent soumettre des propositions de contrôle (dans le langage de la Cour des comptes : de contrôle budgétaire) qui rentrent dans son champ de compétences. Depuis le 9 mars, 170 propositions de contrôle ont déjà été déposées sur la plateforme. Les contributions proposées sur la plateforme permettront de mettre en avant de nouveaux sujets d’enquête, sur lesquels la Cour n’a pas publié de travaux au cours des dernières années. Elle souhaite ainsi aborder  des enjeux significatifs et insuffisamment explorés aujourd’hui.

Une plateforme participative à l’image de la Cour des comptes  

Consciente de la nécessité d’instaurer une logique participative dans le fonctionnement des institutions, la Cour souhaite répondre aux préoccupations et aux interrogations du grand public. Elle ambitionne ainsi d’enrichir son travail des propositions publiées sur la plateforme et de donner une attention particulière aux signaux faibles qu’elles contiennent. Ainsi, grâce à Decidim la Cour adopte une posture d’écoute attentive et anticipative qui capte les sujets d’intérêt des citoyens français et les éventuels angles morts de sa programmation. Au fur et à mesure des années, la Cour pourra capitaliser sur ces contributions et mener une activité de veille. 

A l’image de la constitution de la Cour des comptes en six chambres thématiques, six catégories définissent les orientations de la consultation : économie & finances publiques ; environnement ; éducation & culture ; missions régaliennes de l’Etat ;  territoires ; solidarité et emploi ; sécurité sociale. 

A cette nouvelle approche institutionnelle, qui laisse une grande liberté à la Cour pour définir ses propres modalités de participation, s’ajoute un objectif d’information. L’institution souhaite présenter son fonctionnement, mettre en valeur ses travaux précédents et mieux publiciser ses rapports. Le plateforme  Decidim répond à cet objectif d’information en renforçant notamment la visibilité et l’accès des participants à ses  rapports existants et futurs. 

Le déploiement de la plateforme participative de la Cour des comptes

Afin de l’accompagner dans cette expérimentation nationale et mettre en place une plateforme Decidim pour le grand public, la Cour a sollicité Open Source Politics (OSP). Depuis Janvier 2022, l’accompagnement d’OSP a permis le déploiement et la configuration d’une plateforme Decidim personnalisée.

La Cour a saisi l’importance d’adopter rigoureusement une logique participative et de s’y tenir à toutes les étapes du processus : présentation du fonctionnement de la Cour et des modalités de participation, dépôt des propositions de contrôle, suivi et rapport d’évaluation de la participation. 

L’architecture et la configuration de la plateforme ont été pensées afin de poursuivre les objectifs d’accessibilité à l’information, de simplicité de contribution et d’interaction entre les participants. Les fonctionnalités actives de la plateforme Decidim facilitent la compréhension des enjeux et le dépôt de propositions, assurant ainsi le recueil d’un maximum de contributions qualitatives. 

L’analyse linguistique de la participation 

Au terme de la consultation, les contributions citoyennes feront l’objet d’une analyse quantitative et qualitative et d’une synthèse, réalisée par OSP, qui restituera les principaux enjeux socio-politiques et socio-linguistiques de la consultation. 

L’analyse linguistique quantitative et qualitative des contributions a vocation à rendre compte des contenus pour permettre à la Cour de formuler 6 sujets de rapports. La synthèse permettra de constituer une vue d’ensemble des propositions de requêtes que les citoyens souhaitent voir reprendre par la Cour. Ce travail de synthèse aboutira à la production d’un rapport permettant à la Cour de hiérarchiser les sujets d’investigation et de déterminer l’agenda de réalisation de ces travaux, qui feront également l’objet d’une publicisation sur la plateforme.

Conférence sur l’engagement citoyen dans les Missions européennes

Conférence sur l’engagement citoyen dans les Missions européennes

Le 21 mars 2022, nous avons participé à la Conférence sur l’engagement citoyen dans les Missions européennes organisée par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, dans le cadre de la Présidence française du Conseil de l’Union Européenne. Au titre de son rôle dans la Conférence sur l’avenir de l’Europe, Open Source Politics a été sélectionné en tant que porteur d’idées pour participer au Forum de la société civile et de la recherche, aux côtés de 17 autres organisations.

Decidim et notre plateforme pour la conférence sur l’avenir de l’Europe

Cet événement avait un double intérêt pour nous. D’une part, cet événement organisé au Conseil Économique, Social et Environnemental, a permis à notre équipe de mettre en avant son expertise sur la mise en œuvre de démarches de participation citoyenne numériques. D’autre part, nous avons pu présenter Decidim comme une solution concrète au défi que les sociétés européennes relèvent dans le domaine de l’engagement citoyen.

En parallèle du Forum, Adrien Rogissart et Joel Berenguer-Moncada ont également animé une conférence pour présenter le travail réalisé sur la plateforme de la Conférence sur l’avenir de l’Europe. Plusieurs équipes d’Open Source Politics sont en effet impliquées. Nos équipes conseil, produit et modération assurent la coordination, la mise en œuvre ainsi que la modération de la plateforme située au cœur de cette démarche inédite. 

→ En savoir plus sur le rôle d’OSP dans l’organisation de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe

Ce fut ainsi l’occasion de revenir sur les objectifs et les résultats de cette plateforme lancée au mois d’avril 2021 et qui a accueilli plus de 4 millions de visiteurs et plus de 50 000 participants à ce jour. Au 21 mars 2022, la plateforme comptait plus de 17 000 idées déposées par des citoyens des pays de toute l’Europe sur des thèmes variés.

Chiffres plateforme de la conférence sur l'avenir de l'Europe
Résultats au 17 mars 2021

→ Lien vers notre présentation

Parmi les thématiques, celles ayant suscité le plus d’engagement et de discussions sont le changement climatique et l’environnement, la démocratie européenne, l’éducation et la culture, ou encore l’économie et la justice sociale.

Thématiques de la plateforme de la conférence sur l'avenir de l'Europe

En quoi cette plateforme est-elle inédite ? 

La particularité de cette plateforme réside dans le fait d’avoir posé pour la première fois un cadre de discussion dépassant les champs nationaux grâce à l’instauration d’un dialogue direct entre les citoyens de toute l’Union européenne. Cet exercice démocratique accorde une place centrale aux citoyens européens de par son ouverture et son inclusivité.  L’intégration, par nos équipes, des contenus dans les 24 langues officielles de l’Union européenne a par ailleurs grandement facilité les échanges entre les participants, et constitue un travail inédit. Le caractère multilingue de la plateforme a en effet permis à chacun de faire valoir ses idées, de commenter, ainsi que d’approuver les idées des autres.

side event conference sur l'avenir de l'europe
Side-event sur les résultats de la plateforme de la Conférence sur l’Avenir de l’Europe 

Pourquoi les institutions européennes ont-elles choisi Decidim ?

Les administrations publiques ont conscience des enjeux majeurs que représentent les logiciels libres et l’ouverture des données. La stratégie de la Commission européenne pour le logiciel libre, rendue publique en novembre 2020 insiste sur l’ouverture comme moteur d’innovation, d’autonomie numérique et de respect des citoyens et des utilisateurs. En décembre 2020, le Conseil européen appelait par ailleurs, dans sa Déclaration de Berlin à « promouvoir le développement, le partage et la réutilisation des normes, solutions et spécifications open source par-delà les frontières ».

Le choix des institutions de l’Union européenne d’adopter Decidim pour la mise en œuvre de la plateforme pour la Conférence sur l’Avenir de l’Europe s’inscrit donc dans cet engagement en faveur du logiciel libre. Un choix qui paraît d’autant plus naturel que Decidim partage dans sa conception les principes démocratiques de la Conférence. La décision d’adopter un logiciel libre s’inscrit également dans une logique globale de souveraineté numérique puisqu’il constitue “un moyen de reconquête d’indépendance économique vis-à-vis d’acteurs extra-communautaires et de préservation d’emplois qualifiés au sein de l’Union”.