De la politique de la vie quotidienne au Mouvement des Indignés

De la politique de la vie quotidienne au Mouvement des Indignés

Cette semaine sur le blog, une fois n’est pas coutume, nous allons vous parler d’un livre. Quelques éléments de contexte, remontons dans le temps, en 2011 plus précisément. À la faveur du printemps, des manifestations rassemblant des centaines de milliers de personnes fleurissent partout en Espagne. Le Mouvement des indignés prend vie en réponse à la crise économique que traverse le pays. Bien que les personnes qui manifestent alors forment un groupe hétérogène, elles ont en commun de ressentir un désaveu des citoyen·ne·s envers la classe politique, la volonté d’en finir avec un bipartisme politique sclérosé, et avec la corruption.

D’un ras-le-bol local à un mouvement global

Avance rapide : 2015. Suite au mouvement des Indignés, des dizaines de groupes municipalistes* se sont présentés aux élections municipales et ont obtenu des résultats inattendus. Ils ont remporté les conseils municipaux de grandes villes comme Barcelone, Madrid ou Saragosse, en plus de gagner des sièges dans les conseils municipaux d’opposition. Le municipalisme est maintenant au centre de la vie politique espagnole. Suite à cette transformation du paysage démocratique espagnol que Laura Roth, Arnau Monterde (coordinateur du projet Decidim à la mairie de Barcelone), et Antonio Calleja-López s’associent pour travailler sur le texte Ciudades democraticas, Del 15M al municipalismo del cambio (Villes démocratiques, La révolte municipaliste du cycle post-15M) qui analyse ce changement de paradigme.

*Par municipalisme, il faut entendre la théorie et la pratique qui fait de la municipalité le cœur d’une transformation démocratique de la vie sociale, économique et politique. Cette perspective ne prend pas comme point de départ l’État ou la souveraineté nationale, mais la souveraineté populaire basée sur l’autogouvernement des communautés locales.

— Jonathan Durand Folco, « Les villes contre la Constitution canadienne ? », dans Argument, vol. 19, n° 2, printemps-été 2017, pp. 36-38)

De l’Espagne à la France

Chez Open Source Politics, la découverte de ce texte se fait lors de sa première édition en mai 2019. Sa lecture nous a captivé·e·s car Ciudades Democráticas permet à la fois de comprendre :

  • les conditions d’émergence de la coalition victorieuse en 2015 dans plusieurs grandes villes d’Espagne
  • la colonne vertébrale idéologique des activistes qui la composent et qui avaient des responsabilités dans l’organisation Barcelona en Comù (Barcelone en commun) ou dans l’administration municipale.

À cette époque, le livre n’était disponible qu’en espagnol et il nous paraissait important de permettre la lecture de ce texte à un public francophone. Surtout au vu du contexte des élections municipales de 2020 en France où plusieurs « listes citoyennes » composées d’individus non-engagés préalablement dans des partis politiques se préparaient.

Bien évidemment, à l’heure où vous lisez cet article, nous sommes en 2022, de l’eau a coulé sous les ponts et nous n’avons pas réussi à sortir la traduction avant les élections municipales 🙃. Toujours est-il que vous pouvez désormais lire en français Villes démocratiques, La révolte municipaliste du cycle post-15M et qui sait, cela pourra peut-être inspirer de futures démarches en France ou ailleurs dans le monde francophone 😉.

Une plongée au coeur du municipalisme espagnol

Ce livre se veut être une contribution au débat sur ce qu’est le municipalisme, d’où il vient et où il va. À travers les voix de ses auteurs et autrices se dessine la carte du mouvement des Indignés, et certains débats sur les problèmes et les promesses du phénomène sont détaillés. Dans tous les cas, il s’agit de personnes qui sont impliquées d’une manière ou d’une autre dans le mouvement, que ce soit dans les institutions, dans les plateformes municipalistes ou dans les mouvements sociaux et organisations connexes. Cela reflète en fait l’une des caractéristiques les plus intéressantes du municipalisme actuel : il s’agit d’un processus d’apprentissage conjoint où les mouvements, les plateformes politiques et les institutions publiques testent et examinent de nouvelles façons de faire de la politique.

Du processus historique aux agendas des gouvernements municipalistes et du mouvement lui-même

Le texte est divisé en trois grandes parties. La première partie contextualise les discussions sur le municipalisme et la démocratie, retrace le processus historique du Mouvement des Indignés ou 15M aux élections de mai 2015 et décrit un instantané du municipalisme actuel espagnol. La deuxième partie présente quelques-unes des grandes lignes de l’agenda des gouvernements municipalistes, telles que les politiques publiques liées au droit à la ville, au féminisme, aux biens communs et à la technopolitique. A titre d’exemple, Antonio Calleja-López et Javier Toret y expliquent comment le projet Decidim, promu par la Mairie de Barcelone, fonctionne comme un modèle de développement collaboratif public-commun d’infrastructures numériques pour la démocratie participative. Ils passent en revue certaines des politiques publiques qui ont été mises en œuvre au cours du premier cycle de gouvernement des plateformes municipalistes et discutent des opportunités et des limites. Dans la troisième et dernière partie, la discussion porte sur l’agenda du mouvement lui-même, au-delà des politiques publiques. Cette partie commence par l’analyse et la discussion de l’idée de démocratie dans les organisations, puis se concentre sur la féminisation de la politique et se termine par la discussion du projet de mise en réseau des plateformes municipalistes.

Un décryptage pour comprendre et apprendre des expériences de nos voisins

Les thématiques et les approches des chapitres de ce livre sont aussi variées que le projet municipaliste lui-même. Il est évident qu’elles n’épuisent pas toutes les dimensions et les discussions associées à ce cycle politique initié en 2015, mais il est possible, à partir d’elles, d’acquérir une vision globale de la nouveauté du phénomène, de ses fondements, de ses projets futurs et de ses quelques limites. Malgré les difficultés que pose la mise en œuvre d’un projet aussi ambitieux et complexe, l’expérimentation et l’apprentissage accumulés au cours de ces années promettent d’être d’une grande valeur pour les années à venir. Bien que le cadre de l’État-nation continue d’être dominant, l’horizon d’une ville démocratique est là pour durer.


Photo d’illustration par Jesus Solana sour licence CC BY 2.0 via Wikimedia Commons et traduction mise à disposition selon les termes de la licenc CC BY-NC-SA 4.0

OSP explore : les données de participation et les motivations de l’engagement citoyen

OSP explore : les données de participation et les motivations de l’engagement citoyen

Open Source Politics organise des temps d’échange et de formation afin de mettre à l’honneur la recherche en sciences humaines et sociales sur la participation citoyenne. Pour cette édition, c’est l’expertise de Bertille Mazari et d’Antoine Gaboriau dont nous avons pu profiter.

Bertille Mazari, consultante et membre du pôle anticipation d’OSP, présentait l’étude de Bright et al (2020)¹ dont le terrain de recherche est le site d’e-pétitions lapetition.be. L’objectif était d’identifier les origines et impacts de l’engagement des hyper-utilisateur·ice·s sur la participation, à partir d’une analyse statistique et sociologique.

Quelques mois plus tôt, Antoine Gaboriau (doctorant à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et co-directeur du pôle anticipation d’OSP) présentait à l’équipe une analyse qualitative des données de participation issu de l’article de Gauthier (2019)² et montrait que les gratifications symboliques reposant sur le prestige, le pouvoir, l’estime de soi ou la considération sociale sont déterminantes pour des participant·e·s issu·e·s de catégories sociales moins enclines à un engagement participatif intense.

🎯 Retour sur les informations clés de ces échanges.

Une analyse statistique et sociologique des personnes hyper-utilisatrices : qui sont les personnes qui participent le plus ? 

Qu’est-ce qu’un·e hyper-utilisateur·rice ?

Les hyper-utilisateur·rice·s, que l’on pourrait qualifier de traduction numérique du phénomène TLM (i.e, toujours les mêmes) correspondent à une minorité d’utilisateur·rice·s qui contribuent largement et régulièrement dans un espace donné. En ligne, ces personnes créent la plupart des fils de commentaires, votent et soutiennent plus fréquemment les propositions, signent ou déposent la majorité des pétitions.

L’étude de Bright et al en quelques chiffres

15 000

pétitions déposées en ligne

850 000

personne comprises dans l’échantillon

97,8% des membres ont signé

un maximum de 10 pétitions

0,1%

des membres ont signé plus de 101 pétitions

Les auteurs qualifient d’hyper-utilisateurs les 0,1% des membres ayant signé plus de 101 pétitions en ligne. 

Pourquoi certaines personnes deviennent « hyper-utilisatrices » plutôt que d’autres ? 

Dans cette étude, les données statistiques obtenues montrent que deux variables indépendantes se distinguent. Le tableau ci-dessous présente les résultats de la régression de Poisson appliquée aux données de participation. Cette régression permet de déterminer quelles sont les variables corrélées à un plus grand nombre de signatures par participant·e. Les résultats suggèrent que les valeurs des deux variables indépendantes « la première pétition signée a récolté un grand nombre de signatures » ainsi que « être au chômage ou à la retraite » sont plus élevées que les autres.

Examen des facteurs expliquant l’apparition d’hyper-utilisateur·rices à l’aide de modèles de régression, Bright et al., 2020

Les personnes dont les premières interactions avec le site ont été satisfaisantes sont plus susceptibles de devenir hyper-utilisateur·rice·s : de quel type et de quel nombre d’interactions parle-t-on ? 

Bertille rappelle que les interactions satisfaisantes correspondent à la fois à une utilisation fructueuse de l’interface, à des retours venant du site lui-même et à la satisfaction de la mise en relation directe avec les autres utilisateurs. Très souvent les hyper-utilisateur·trices portent un jugement appréciatif sur les interactions directes qu’ils ont eu avec d’autres membres du site. Le fait d’avoir eu des conversations intéressantes, d’obtenir des réponses à leur questions ou encore d’avoir un sentiment d’appartenance à un groupe (lorsque des consensus sont formés par exemple) augmentent les chances que les individus participent à nouveau

Bright et al constatent un effet vertueux des quatre premières participations sur la probabilité de devenir un hyper-utilisateur·rice. Les résultats des quatre premières pétitions ont un impact positif sur le comportement des membres : les participant·es sont plus enclin·es à signer une nouvelle pétition si la précédente a obtenu un certain nombre de signatures. Cependant, « une fois qu’une personne a signé cinq pétitions, cet impact se réduit ». Cela signifie que les quatre premières interactions avec le site sont déterminantes quant à l’engagement ultérieur de l’utilisateur·rice. Au-delà de ces 4 interactions, les participant·e·s font preuve de moins d’attention aux signaux relatifs à l’efficacité potentielle de leurs actions.Bertille mentionne une différence entre les utilisateur·ice·s dits « normaux » et les hyper-utilisateur·rice·s, cette dernière catégorie étant susceptibles de signer des pétitions ayant récolté moins de signatures que les autres membres. Les hyper-utilisateur·rice·s ont un seuil de participation plus bas (cf. tableau) dans le sens où le nombre minimal de signatures nécessaires pour inciter à la participation est plus bas (Huang et al., 2015). On remarque effectivement que ces personnes ont tendance à signer des pétitions très peu signées.

Très souvent, le temps libre est présenté comme étant indispensable au fait de mener une activité nécessitant un fort engagement (Brady et al., 1995 ; Wilson, 2000).  Il n’y a rien d’étonnant à ce que les auteur·es suggèrent que la raison pour laquelle les personnes à la retraite et au chômage soient plus enclin à devenir hyper-utilisateur·trices comparativement aux personnes disposant d’une activité professionnelle. Cependant, cette explication semble peu nuancée et insuffisante : bien qu’avoir du temps libre soit une caractéristique qui participe à l’engagement citoyen, il ne rend pas compte des raisons de la très forte participation des hyper-utilisateur·trices. 

Pourquoi les personnes qui appartiennent à des catégories sociales désinsérées de la vie politique s’investissent dans des dispositifs de participation ? 

Antoine Gaboriau discute l’article de Gauthier (2019) et propose une une piste d’exploration intéressante : l’engagement apporterait des bénéfices symboliques qui motivent à la participation et qui expliquent l’engagement parfois intense de participant·e·s issu·e·s de catégories sociales qui ne les prédisposent pas à ce type de participation. Le public d’OSP a fait des liens avec l’étude des hyper-utilisateur·rice·s ; il pourrait être en effet pertinent d’étudier cet effet de bénéfices symboliques sur l’apparition des hyper-utilisateur·rice·s. 

Gauthier (2019) a mené des entretiens et sélectionné les « inouïs » de la participation, c’est-à-dire les personnes qui appartiennent à des catégories sociales désinsérées de la vie politique (et donc plus susceptible d’être éloignés de la participation par opposition aux habitués, qui se situent à l’autre bout du spectre). L’objectif est de rendre compte des représentations des enquêtes, de présenter des parcours de participation et des carrières citoyennes (Birck, 2011 ; Talpin, 2011 ; Nez, 2013) pour trouver dans le monde social les motivations qui ont pu favoriser l’engagement participatif
Sans jeter le discrédit sur les bonnes intentions qui animent les profanes engagé·e·s dans les collèges « habitants » des conseils citoyens, Antoine met en doute l’exclusivité du motif du devoir civique comme motivation de l’engagement participatif et réaffirmer que « les agents sociaux n’accomplissent pas d’actes gratuits » (Bourdieu, 1994, p. 150). Le modèle des « rétributions symboliques » élaboré par Daniel Gaxie (Gaxie, 1977, 2005) pour étudier les mécanismes qui favorisent l’enrôlement et l’attachement au militantisme dans les organisations partisanes apparaît particulièrement pertinent pour analyser les ressorts de l’engagement des « habitués » et des « inouïs » de la participation. Comme le précise Gauthier, les gratifications symboliques reposant sur le prestige, le pouvoir, l’estime de soi ou la considération sociale sont ainsi déterminantes pour des participant·e·s membres des classes populaires.

Quelle influence ont les hyper-utilisateur·trices sur la participation en ligne ? 

On le disait ci-dessus : les hyper-utilisateur·trices ont un poids important sur la participation en ligne. Comment peut-on évaluer ce poids ? Bright et al (2020) formulent deux hypothèses qu’ils cherchent à confirmer ou infirmer dans leur étude. 

Hypothèse 1. « Les centres d’intérêts des hyper-utilisateur·rice·s divergent de ceux des autres membres du site ».

Les intérêts des membres sont définis par le thème des pétitions signées, renseignées sur le site lapetition.be. Le choix des thèmes se fait parmi différentes catégories : « Protection des animaux », « Art et culture », « Environnement », « Droits humains », « Humour », « Loisir », « Politique », « Autres » et « Enjeux sociaux ».

Graphique présentant la distribution des signatures en fonction du nombre de signatures par participant·e et de la catégorie d’intérêt. Bright et al. 2020.

Les résultats de l’étude, que l’on retrouve notamment dans le graphique que l’on a reproduit ci-dessus, suggèrent que les signataires d’une seule pétition signent des pétitions portant sur une large variété de thématiques. Au contraire, les personnes qui signent le plus de pétitions semblent se concentrer quasi exclusivement sur les droits et la protection des animaux. L’hypothèse 1 est donc confirmée.

Hypothèse 2. « Les hyper-utilisateur.rice·s rencontrent plus de succès que les membres habituels dans leurs interactions avec les sites de cyber-démocratie ».

La deuxième hypothèse concerne la capacité des hyper-utilisateur·rice·s à récolter des signatures. 

Bright et al ont mesuré cela en observant par individu, les performances des pétitions créées, évaluées en fonction du nombre final de signatures récoltées. Les résultats montrent que les personnes qui signent davantage de pétitions créent des pétitions plus efficaces. C’est en cela que les auteurs affirment qu’une « lecture des sujets de pétitions ayant récolté le plus de signatures pourrait donc donner une vision franchement déformée de ce qui intéresse et mobilise les gens, puisque celles-ci auront probablement été générées par une minorité très active ». 

L’hypothèse 2 est donc également confirmée : bien que les hyper-utilisateurs aient des domaines d’intérêt qui divergent de ceux des autres membres, l’étude montre qu’ils sont plus efficaces afin de mobiliser des signatures. 


Références 

  1. Bright, J., Pilet, JB., Soubiran. T., Bermudez, S, 2021, Origines et impacts des hyper-utilisateurs et hyper-utilisatrices en cyberdémocratie. Le cas du pétitionnement en ligne. Participations – Revue de sciences sociales sur la démocratie et la citoyenneté, De Boeck Supérieur, 2021, Participations – Revue de sciences sociales sur la démocratie et la citoyenneté, 28, pp.125-149. ffhal03242840f
  2. Gauthier, Y., 2019, « Devenir quelqu’un ». (Re)valorisation de l’identité sociale par les bénéfices symboliques de l’engagement participatif. Participations, 24, 111-137.
Les plateformes participatives, quel bilan 5 ans après ?

Les plateformes participatives, quel bilan 5 ans après ?

Ce n’est pas un secret, les plateformes de démocratie participative se sont multipliées dans tous les types d’organisations et à toutes les échelles au cours de la décennie écoulée. Des budgets participatifs de Nanterre à New York, des consultations citoyennes de Lens à la Commission européenne, le recours croissant à des outils numériques a permis d’élargir la participation, d’enrichir les délibérations, mais aussi de soulever des limites inhérentes à l’usage technologique et aux méthodes d’intelligence collective. Découvrez dans ce point d’étape à 5 ans, ce que nous avons appris autant que ce qu’il reste à prouver.

Une démocratie participative numérique qui se développe entre le silence et le bruit

Geolina163, CC BY-SA 4.0 , via Wikimedia Commons

Les plus directs diront que notre régime n’est pas démocratique à proprement parler – c’est-à-dire un système politique dans lequel chaque citoyen·ne dispose d’une égale possibilité d’influer sur la décision – mais une oligarchie conçue pour servir certains intérêts dominants et entretenue par le mirage d’élections défaillantes organisées à intervalles réguliers.

En réponse à cette frustration de ne pas compter dans les choix politiques qui affectent nos vies, une voie intermédiaire existerait entre le silence de ceux qui renoncent à utiliser leur voix et le bruit de ceux qui n’expriment que de la colère.

2011 – l’illusion d’une révolution ? Des printemps arabes aux mouvements des places apparus sur les cinq continents, les nouvelles plateformes numériques sont le vecteur d’éruptions démocratiques spontanées, qui convergent vers une même aspiration de justice sociale et de démocratie réelle.

Il est tentant de penser que les institutions obsolètes peuvent être mises à jour

Nous sommes des citoyens du XXIe siècle qui faisons de notre mieux pour faire fonctionner des institutions qui ont été conçues au XIXe siècle et sont basées sur un support d’information qui remonte au XVe siècle. 
Il est temps de commencer à nous poser la question : quelle démocratie voulons-nous à l’ère d’internet ?

Pia Mancini, lors de son intervention lors de la conférence TED Global de 2014

En 2012 à Buenos Aires, des hacktivistes créent la plateforme DemocracyOS, Pia Mancini avec ses collègues veulent mettre à jour la démocratie en Argentine comme au-delà. A travers leur plateforme mobile open-source, leur but a été d’introduire le citoyen au coeur du processus législatif avec la promesse d’un mandat impératif direct suivant les votes exprimés en ligne.

La passion française pour les plateformes a conduit à l’émergence d’un marché 

Licence Ouverte – Etalab via gouvernement.fr

Concertations réglementaires, budgets participatifs, enquêtes en ligne, interpellations citoyennes… En moins d’une décennie, la majorité des grandes collectivités s’est dotée d’une plateforme numérique pour accueillir et diversifier ses démarches de démocratie participative. L’État a également multiplié les démarches, au point que plusieurs entreprises françaises ont pu naître et se pérenniser en proposant des outils et un accompagnement. 

Avec près d’un millier de plateformes déployées en cinq ans, la France a beaucoup plus investi ce terrain que ses voisins européens et homologues anglo-saxons.

En 2015, pour la première – et unique – fois, un projet de loi ; la loi pour une République numérique est soumis aux propositions et réactions des internautes avant d’être présenté au Conseil d’État et débattu au Parlement. Après une première concertation en amont menée par le Conseil national du numérique en 2014, une consultation sur le texte du gouvernement est ouverte durant trois semaines à l’automne 2015. La plateforme recueille près de 8 500 contributions de plus 20 000 participants. Le texte porté par la secrétaire d’État au numérique Axelle Lemaire et amendé par les internautes sera adopté à l’unanimité.

Les plateformes participatives ont rempli certaines de leurs promesses initiales, mais des progrès restent à faire

Transcender les limites d’espace et de temps pour un débat permanent 

Imaginons qu’on veuille faire voter les 38 223 supporter·rice·s des Sang-et-Or (du club de football du Racing Club de Lens) sur le boycott de la Coupe du Monde au Qatar, en leur laissant à chacun·e 1’30 pour exprimer leur position et 30 secondes pour voter à la fin… Il faudrait près de 16 heures d’échanges et de scrutin sans interruption.

Avec une plateforme, le débat et la prise de décision peuvent être à la fois menés en asynchrone et en simultané. Il est possible de cartographier tous les arguments et d’ajouter des étapes intermédiaires pour montrer une progression.

Rob Mieremet / Anefo, CC0, via Wikimedia Commons

➡️ Comment aller plus loin ? Choisir entre plusieurs options au-delà du binaire vote oui/non.

Depuis 2021, la ville de Lens anime des assises du développement durable et des projets d’aménagement public sur sa plateformeEn diffusant le lien sur le bord du terrain, le nombre de participants pourrait être multiplié par 200.

 Réconcilier numérique et présentiel pour combiner le meilleur des deux espaces

Une critique récurrente – et réelle – des démarches participatives dénonce le fait qu’elles attirent “toujours les mêmes.” Sans forcément parvenir à modifier la sociologie des participant·e·s – des études précises restent à mener – les plateformes permettent a minima d’élargir les modalités de contribution, et donc les cibles

Là où la contribution présentielle est le plus souvent orale et éphémère, sa restitution sur une plateforme participative en garde une trace numérique plus durable et ouverte aux commentaires a posteriori. 

Toujours en 2021, l’Autorité organisatrice des transports de la métropole de Lyon, le SYTRAL Mobilités a réuni sur une même plateforme toutes ses concertations réglementaires. On y trouve un agenda des rencontres avec les usagers qui distingue les rencontres en présentiel, en ligne et hybrides. Découvrez notre article sur le sujet.

Étendre la mémoire des projets participatifs et raconter leur(s) histoire(s)

Tant de consultations organisées pour la forme, dont les conclusions sont oubliées aussitôt publiées ? 

Si elles sont bien documentées par les organisateurs et garants des débats, les plateformes participatives peuvent garder la mémoire des projets sur le temps long. En stockant les éléments d’information et de réglementation, elles deviennent la ressource de référence autour d’un projet. 

➡️ Comment aller plus loin ? Diversifier les formats de contribution, en se basant davantage sur le narratif, l’observation, le récit de l’expérience vécue (ex : recensement des moineaux ou des noms de rues féminins par la métropole européenne de Lille…)

Grimper sur l’échelle de la participation en donnant du pouvoir aux habitant·e·s

En 1969, l’échelle de la participation est définie par Sherry Arnstein pour distinguer les démarches en fonction du degré d’implication des participant·es. 

échelle de la participation

La généralisation des plateformes dans les villes françaises de toutes tailles a accompagné l’essor phénoménal des budgets participatifs depuis 2014. Ces démarches impliquent les habitant·es à un niveau élevé : dépôt et choix direct des projets, voire dans les meilleurs cas, association à l’établissement ou la révision des règlements, évaluation de la faisabilité, priorisation avant le vote, co-construction avec les services, responsabilisation dans la réalisation.

➡️ Comment aller plus loin ? Proposer aux habitant·e·s de répartir le budget d’une collectivité (hausses et réductions) et pas seulement de dépenser une modeste enveloppe du budget d’investissement.

Démultiplier le poids des mobilisations sur les sujets qui animent les citoyen·ne·s

Déjà populaire avant le numérique, le recueil de pétitions est le premier usage participatif en ligne en volume depuis la fin des années 1990 (Change.org revendique 500 millions de comptes dans le monde). Puisqu’il est mesuré sur la quantité de personnes mobilisées, le succès est directement proportionnel à la communication qui est investie dans la diffusion de la pétition.

➡️ Comment aller plus loin ? Développer les usages locaux avec des plateformes d’interpellation citoyenne de proximité pour contribuer à l’ordre du jour de l’organe délibératif, susciter le lancement d’une nouvelle consultation, demander le contrôle d’une politique publique…  

EN 2020, La plateforme de pétitions du Sénat garantit des signatures anonymisées grâce à une authentification déportée sur FranceConnect. 4 pétitions ont dépassé le seuil requis des 100 000 signatures authentifiées en moins de 6 mois ; la première portant sur la désolidarisation des revenus du conjoint pour le paiement de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) a été suivie d’une évolution législative majeure en 2022.

Il reste de bonnes raisons de douter de l’intérêt des plateformes participatives

La confiance est émoussée après la multiplication d’expériences inachevées

La condition de la confiance entre les responsables à l’initiative des démarches participatives et les participants est que les premiers respectent la valeur de la contribution des seconds. Les règles de prise en compte de la parole citoyenne doivent être claires à chaque étape et ne pas varier sans justification. Une consultation doit donner lieu à une reddition de compte. Un vote doit être suivi d’une présentation de l’avancement des réalisations. 

➡️ Comment améliorer cela ? Donner un pouvoir clair aux participants, par l’obtention en amont d’un engagement écrit des élu·es sur les antécédents pris en compte, les marges de manœuvre et les modalités de réponse aux contributions puis de droit de suite. 

En 2021, dans le cadre de la Convention citoyenne pour le climat, 150 citoyen·ne·s tiré·es au sort ont préparé, voté et remis au président de la République 149 propositions visant à respecter les engagements de réduction des gaz à effet de serre de la France, dans un esprit de justice sociale. Contrairement à l’engagement initial d’un relai “sans filtre” vers le référendum, le Parlement ou la voie réglementaire, une part conséquente des propositions sont rejetées ou vidées de leur substance par le Gouvernement.

La désinformation et la violence sapent la qualité des échanges en ligne

Sapiens n’est pas un être démocratique parfait. Nos biais individuels et collectifs se retrouvent dans nos décisions, et peuvent être exploités à notre encontre. Les technologies de la désinformation n’en sont qu’à leurs balbutiements. Nous pouvons craindre une généralisation de deep fakes capables de déstabiliser n’importe quel débat. La violence des échanges en ligne, souvent sous pseudonyme, nuit également à la participation.  

➡️ Comment améliorer cela ? Donner du sens en stimulant esprit critique et culture de la participation, pour rapprocher les citoyen·nes de l’idéal d’une égalité des capacités à participer (cela marche dans le cadre des conventions citoyennes). 

Dans l’affaire Cambridge Analytica en 2016, l’utopie d’une démocratie sans cesse plus libre et éclairée dans le cyberespace est percutée par la mise en lumière des bulles de filtre, la viralité des fake news et le détournement des failles des réseaux sociaux par les partisans du Brexit puis de Donald Trump.

L’organisation de débats en ligne et hors ligne présente un coût financier élevé

Au regard du coût d’un débat en ligne et/ou hors ligne et des résultats souvent modestes en termes de solutions originales ou de réponses inédites, l’investissement consenti par la puissance publique peut parfois sembler excessif. Si le recours aux seules plateformes peut donner l’impression de représenter une économie par rapport à l’animation hors ligne, c’est oublier que l’outil numérique ne se suffit jamais à lui-même

➡️ Comment améliorer cela ? Donner du temps à la progression d’un débat, en alternant des temps intensifs en petits effectifs et des phases d’idéation puis de validation par le grand public, et relativiser le coût par rapport à celui de mauvaises décisions. 

Organisé en réponse au mouvement des Gilets Jaunes, le grand débat national s’appuie sur la récolte de cahiers de doléances, des milliers de débats locaux et une plateforme proposant des questionnaires fermés et des contributions sans interaction. Décriée notamment pour sa synthèse partielle et partiale, l’opération globale – qui reste la plus chère conduite en France – a coûté 12 millions d’euros, dont un million pour la plateforme participative. 

La professionnalisation de la participation réduit la spontanéité des démarches

Des formations spécialisées ont vu le jour à l’université, des rencontres professionnelles se tiennent chaque année et plusieurs milliers de consultant·e·s font profession de leur expérience dans la conception, l’animation et la restitution de démarches participatives. Des universitaires s’interrogent toutefois sur la capacité de ces personnes à sortir de la stricte mise en place de procédures délibératives, pour guider les participant·e·s sur le fond des sujets conflictuels, parfois au détriment de leurs commanditaires.

➡️ Comment améliorer cela ? C’est à nous en tant que consultant·e·s d’être exigeant·e·s et de déployer des compétences stratégiques auprès des clients. 

L’externalisation de la conduite et de l’évaluation de nombreuses politiques publiques touche le champ de la participation citoyenne. EN 2022, L’Affaire McKinsey (et cie) éclate au grand jour. La DITP pilote un nouvel accord-cadre multi-attributaire pour l’organisation de tous les prochains débats publics portés par l’État – dont le volet plateforme fait partie. 

Les interfaces numériques de participation restent trop peu attractives

Si l’identité graphique s’est grandement améliorée au cours de la dernière décennie, les plateformes participatives, encore majoritairement fondées sur des contributions textuelles, ne sont pas à jour des usages privilégiés aujourd’hui, notamment par les jeunes générations. Cependant, la prise en compte de contributions imagées, vocales ou vidéo poserait de nouveaux défis de retranscription, de traduction, de modération et de restitution. 

➡️ Comment améliorer cela ? Multiplier les tests utilisateurs et investir plus massivement dans l’amélioration de l’UX et des fonctionnalités des plateformes participatives. 

Après une succession de pilotes à l’échelle de quartiers, la ville de New York a lancé son premier budget participatif sur Decidim en septembre 2022.  Alliant les actes à ce qui reste trop souvent du registre de la parole en France, les équipes de la ville visent prioritairement un public jeune, divers et défavorisé. Le vocabulaire adopté est moins institutionnel et le parcours utilisateur doit être largement simplifié.

Les plateformes ne rassemblent pas des échantillons représentatifs 

Ce n’est pas une condition indispensable pour toutes les démarches, mais il est généralement attendu d’une démarche participative qu’elle démontre une certaine représentativité. Il n’existe pas encore de consolidation fiable et les données socio-démographiques sont déclaratives et facultatives sur les plateformes, mais quelques tendances sont fréquemment observées :

  • les hommes contribuent davantage que les femmes ;
  • les actifs et les retraités sont plus nombreux que les jeunes ;
  • les exclus du numérique sont absents…  

➡️ Comment améliorer cela ? Aller à la rencontre des citoyen·es dans l’espace public et en porte-à-porte avec des tablettes pour faciliter leur connexion.  

Connaissez-vous le film Moi, Daniel Blake de Ken Loach ? S’il fallait une illustration du bien-fondé de la médiation numérique en voilà bien une… Contraint de s’inscrire dans une agence de recherche d’emploi pour bénéficier d’une aide sociale, Daniel Blake, 59 ans, est confronté à de basiques mais insurmontables services en ligne. Le film remporta la Palme d’or du Festival de Cannes en 2016. 

La multiplication des sollicitations entraîne une lassitude démocratique

Nous n’aimons pas ne pas être consulté·e·s, mais ce n’est pas parce que nous le sommes que nous participons. Après plusieurs années de croissance de leur visibilité, les budgets participatifs voient leur taux de participation stagner, parfois baisser. Les consultations s’enchaînent à tous les niveaux administratifs, le plus souvent sans prise en compte durable des résultats, dans un climat d’expression en ligne délétère, sur des plateformes trop austères… d’aucuns anticipent un “burn-out citoyen”. 

➡️ Comment améliorer cela ? Faire vivre une véritable expérience démocratique aux participant·es : au-delà des résultats de la consultation, c’est le déclic citoyen qu’il faut générer et entretenir, dès le plus jeune âge.

EN 2021 pour la première Convention citoyenne étudiante de l’Université Paris-Est Créteil, 150 étudiant·e·s ont conçu, choisi et continuent de suivre la réalisation de propositions sur le thème de l’alimentation, au cours d’une expérience participative inédite à l’université. Convention citoyenne étudiante

Les plateformes participatives doivent prouver qu’elles sont indispensables 

Les plateformes doivent s’adapter à l’attente de simplicité des usages

Inscription vérifiée par une carte d’identité numérique, questionnaire par image, contributions par la voix, “gamification” et récompense pour les utilisateurs, immédiate analyse par des IA, balade interactive dans la maquette d’un projet, votes par avatar ? De nouveaux usages pourraient apparaître, avec le défi de dépasser le gadget technologique pour répondre aux limites actuelles des plateformes textuelles. Ce n’est pas gagné… 

➡️ Quelle est la prochaine étape ? Poursuivre le développement des plateformes en bénéficiant de l’expertise de designers, multipliant les tests UX et facilitant l’inscription sécurisée aux plateformes.

Il y a 15 ans en 2007, la vie politique avait déjà tenté une incursion dans le métavers à travers une campagne sur Second Life ! Chaque candidat accueillait militant·e·s et curieu·x·ses dans un QG virtuel où se retrouvaient propagande de campagne et discussions entre avatars. Bientôt le retour pour la campagne 2027 ?

Les plateformes doivent en même temps répondre à la complexité des enjeux

Pour gagner en profondeur, les démarches participatives en ligne doivent permettre une réintermédiation des prises de décision, apporter une information plus digeste, diversifier encore les interactions pour des délibérations de bout en bout. Sans contradiction avec l’amélioration des parcours utilisateurs, elles doivent être en mesure de servir une démarche multilingue et des analyses enrichies. 

➡️ Quelle est la prochaine étape ? Organiser un retour d’expérience public des premières démarches de grande ampleur et les renouveler avec des plateformes de plus en plus complètes et robustes.

Sur la plateforme multilingue de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, les citoyens de toute l’Union pouvaient déposer des idées et créer des événements dans leur langue et lire les autres contributions grâce à un système de traduction automatique. 

La démocratie liquide pourrait redevenir une  innovation numérique

Combinant des possibilités de participation directe et de représentation dynamique, la démocratie liquide fonde la prise de décision collective sur une délégation libre et évolutive des voix. Un outil numérique est indispensable pour suivre les droits de vote et calculer les résultats. 

À condition de répondre effectivement au défi de leur empreinte énergétique, les protocoles blockchain pourraient trouver ici une application démocratique. Les plateformes existantes n’ont pas encore dépassé le stade du prototype.

➡️ Prochaine étape : engager un programme de recherche et développement pour financer une nouvelle phase d’expérimentation.

2006 – Liquid feedback – Pendant les années d’émergence des Partis Pirates en Allemagne et en Scandinavie, des logiciels de démocratie liquide ont été expérimentés en interne, sans dépasser ce cercle.

Le code commun doit être la norme pour contrer la privatisation des services

Soutenus dans les discours, mais pas toujours dans les investissements des acteurs publics français, les logiciels libres doivent être choisis stratégiquement pour garantir la transparence démocratique des algorithmes, conserver une indépendance vis-à-vis des éditeurs, partager les compétences et mutualiser les investissements. Longtemps dominé par des acteurs propriétaires, le secteur évolue doucement vers une ouverture par défaut du code source des plateformes participatives.

➡️ Prochaine étape : soutenir la stratégie d’investissement de l’État et des collectivités dans les communs numériques.

Ce n’est pas entre régulation et absence de régulation que nous avons à choisir. Le code régule. Il intègre – ou non – un certain nombre de valeurs. Il garantit certaines libertés, ou les empêche. Il protège la vie privée, ou promeut la surveillance. Des gens décident comment le code va se comporter. Des gens l’écrivent. La question n’est donc pas de savoir qui décidera de la manière dont le cyberespace est régulé ; ce seront les codeurs. La question est de savoir si nous aurons collectivement un rôle dans leur choix – et donc dans la manière dont ces valeurs sont garanties – ou si nous laisserons aux codeurs le soin de choisir nos valeurs à notre place.

2000 – Code is Law, Pr. Lawrence Lessig

Le sens des priorités doit dicter un changement d’échelle des plateformes

Pour finir ce bilan, nous nous devons de préciser que de multiples facteurs concourent à une fragilisation de la pratique démocratique dans tous les pays occidentaux. Les effets concrets sont déjà visibles. Face à l’urgence climatique, les décisions tardent alors que les conditions d’habitabilité de la planète se dégradent de manière sensible et accélérée. 

Il faut croire qu’une réponse pacifique et équitable aux deux défis reste possible et que les démarches participatives se généraliseront pour y parvenir. 

Les plateformes participatives seront utiles si des décisions plus fondamentales y sont prises. 

➡️ La prochaine étape : utiliser une plateforme adaptée pour prendre et documenter les prochaines décisions collectives dans vos organisations ?

Les 4 scénarios de l’ADEME

Pendant deux ans, L’ADEME a travaillé sur 4 scénarios pour que la France atteigne la neutralité carbone en 2050. L’agence appelle les acteurs publics à décliner cette matière en associant les citoyen·es. Open Source Politics dans le cadre de son programme Open Climate Politics, a créé des modèles de consultations dérivées des scénarios de l’ADEME et directement déployables sur une plateforme Decidim. Elles constituent des jalons de démarches plus ambitieuses allant d’un engagement fort sur un objectif de décarbonation au suivi des réalisations en passant par l’animation d’une fresque du climat, d’une convention citoyenne…   

Métro, tramway, bus, transport par câble : les concertations de SYTRAL Mobilités pour penser de grands projets urbains de mobilité.

Métro, tramway, bus, transport par câble : les concertations de SYTRAL Mobilités pour penser de grands projets urbains de mobilité.

SYTRAL Mobilités, l’établissement public local en charge d’organiser les transports publics de la métropole de Lyon et du département du Rhône fait appel à Open Source Politics depuis 2021 pour co-construire ses grands projets urbains de mobilité avec toutes les parties prenantes concernées sur une plateforme Decidim. 

Une plateforme participative pour organiser les concertations réglementaires du plan de mandat sur les mobilités 

Que ce soit pour répondre aux exigences du code de l’environnement, du code de l’urbanisme ou pour ses démarches volontaires, SYTRAL Mobilités a choisi l’outil Decidim pour réaliser les concertations préalables ouvertes à l’ensemble des personnes et structures concernées (habitantes, usagères, associations, entreprises ou institutions). 

Sous le contrôle de la Commission nationale du débat public (CNDP) pour certaines, ces concertations ont été menées pour les différents projets de mobilité. Les parties prenantes au débat ont ainsi donné leur avis sur :

  • la création ou le prolongement de lignes de tramway, de bus ;
  • sur le développement du réseau de métro ;
  • ou encore sur l’opportunité d’une ligne de transport par câble.  

Pour chacun de ces projets de mobilité, un espace dédié à été ouvert sur la plateforme Destinations 2026 qu’a développé Open Source Politics sur la base du logiciel libre Decidim. Notre mission comprenait également la reprise de l’espace préexistant dédié à la concertation liée au tramway T6 Nord, qui était hébergée sur l’instance Decidim d’un autre prestataire.

Dans chaque espace, il est possible de consulter toutes les informations relatives au projet ainsi que le tracé envisagé des lignes, l’agenda de la concertation préalable et les comptes rendus des événements et rencontres associés. Les utilisateur•rice•s du site ont pu y déposer un avis public via une boîte à idées ou encore poser une question à destination des équipes de SYTRAL Mobilités ou des garants. 

Dans le contexte sanitaire incertain de 2021, la plateforme a constitué le véritable hub central de l’information-concertation des différents projets.

Les chiffres clefs du projet

Chiffres d’octobre 2022

  • 3 mois de travail préparatoire
  • 8 consultations/consultations (6 en cours, 2 terminées)
  • 2321 avis déposés (tous projets confondus)
  • 1270 questions déposées
  • 6000 réponses aux questionnaires

Un succès à la hauteur des projets de mobilités envisagés

Le projet de ligne de transport par câble entre les villes de Francheville et de Lyon a notamment suscité une forte participation. L’opportunité d’un mode original, nouveau en France dans son ampleur, pour desservir des territoires ayant une topographie contrainte a été particulièrement débattue. Les communes de l’Ouest lyonnais se situant sur le tracé ont en effet manifesté une très vive opposition (voir le bilan de la concertation rédigé par les garant·e·s CNDP) et le projet a finalement été abandonné par SYTRAL Mobilités, qui s’est engagé à améliorer autrement la desserte locale en transports en commun. Cet exemple montre que les concertations réglementaires et préalables aux projets d’aménagement ou d’équipement donnent un réel pouvoir d’inflexion sur la politique de la ville aux administré·e·s, directement impliqué·e·s dans les processus de décision. 

Ayant par la suite accompagné la Ville de Lyon pour le lancement de sa plateforme de participation citoyenne Oyé, nous avons pu faire bénéficier à la plateforme de SYTRAL Mobilités du service d’authentification Grand Lyon Connect, permettant aux habitant·e·s de la Métropole de Lyon de n’utiliser qu’un compte pour accéder à l’ensemble de ces services numériques. 

Partenariat Egis Conseil-Open Source Politics

Un travail de collaboration et une pluralité de cabinets de concertation engagés comme assistants à maîtrise d’ouvrage

Lorsque SYTRAL Mobilités a publié son appel d’offre pour bénéficier d’une plateforme de participation citoyenne, nous avons tout de suite été très enthousiastes à l’idée de travailler avec un acteur de ce type sur une démarche aussi innovante. L’idée de nouer un partenariat avec Egis Conseil est apparue tout aussi naturellement, le groupe témoignant d’une excellente connaissance des projets de transports et des enjeux du territoire grâce à une équipe de consultant·e·s implantée à Lyon. La modularité de Decidim combinée à l’offre de conseil renforcée du partenariat Egis – OSP ont permis de répondre au besoin transversal d’accompagnement des projets du plan de mandat de SYTRAL Mobilités tout en conservant les spécificités de chacune des concertations.

Nous avons poursuivi un travail de collaboration approfondi avec les assistants à la maîtrise d’ouvrages issus des différents cabinets de concertation sélectionnés pour chacun des projets de mobilité. C’est ainsi que, sur une même plateforme, chacune des parties prenantes des différents projets a pu bénéficier d’accès aux espaces projets de manière totalement indépendante. L’adaptabilité de Decidim permet en effet une large autonomie d’action en octroyant aux divers administrateur·ice·s une palette de droits d’administration différenciés.

Enfin, l’organisation de points de rencontre collectifs et d’expertise croisée, nommés « cafés des concertants » avec les consultant·e·s et l’équipe de SYTRAL Mobilités ont par ailleurs permis de renforcer la transversalité de la collaboration ainsi qu’un partage d’expérience vertueux autour des questions d’ingénierie de la concertation. Un beau projet qui ouvre la voie à de nouveaux projets du même type.

Cet article a été rédigé en collaboration avec Tom Nasr, consultant pour Egis Conseil.


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